Le 20 octobre, plus de 450 élus étaient présents au congrès des maires et présidents d'intercommunalités en Ardéche.
Assemblée générale, salon des entreprises partenaires, table ronde sur la compétence économique ... les débats et les échanges se sont succedés.
Durant cette journée Annonay Agglo a présenté une vidéo afin de revenir en images sur le travail mené avec Vivarhône, Ardoix et Quintenas pour préparer le changement de périmètre de l'intercommunalité.
L'occasion également pour moi d'intervenir en introduction de la table ronde de l'après midi sur la nouvelle répartition des compétences en matière d’interventions économiques suite à la loi NOTRe. Vous pouvez retrouver mon intervention:
J’ai été invité en ouverture de cette table ronde à présenter la nouvelle répartition des compétences en matière de développement économique à la suite de l’adoption de la loi NOTRe.
Promulguée le 7 août 2015, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, constitue le troisième volet de la réforme territoriale du quinquennat de François Hollande.
La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, appelée loi MAPTAM, représente le premier volet de cette réforme. Elle a notamment créé les conférences territoriales de l’action publique (CTAP) et profondément rénové le statut des métropoles, tout en ouvrant la voie à la clarification des compétences.
En matière de développement économique, il faut préciser que la loi MAPTAM a d’ores et déjà confié aux régions la gestion des fonds structurels européens comme le FEDER.
Le deuxième volet a redessiné la carte des régions métropolitaines, avec pour ce qui nous concerne la fusion des régions Auvergne et Rhône-Alpes. C’est la loi du 16 janvier 2015.
La loi NOTRe, même si l’on ne peut pas parler de loi de décentralisation en tant que telle du fait de l’absence de transferts importants de nouvelles compétences de l’État vers les collectivités, opère des changements profonds dans notre organisation territoriale décentralisée. Je pense à la refonte de la carte intercommunale sur tout le territoire et aux nouvelles compétences confiées aux EPCI à fiscalité propre, mais aussi à la suppression de la clause de compétence générale des régions et des départements.
Ces deux points sont directement liés au sujet qui nous intéresse: la nouvelle répartition des compétences des collectivités territoriales et de leurs groupements en matière d’interventions économiques.
Avant de l’aborder, je souhaite faire une rapide parenthèse sur les conséquences de la suppression de la clause de compétence générale des régions et des départements. Avant sa suppression, comme vous le savez, l’ensemble des catégories de collectivités territoriales pouvait intervenir dès lors qu’il existait un intérêt public local et que la compétence concernée n’était pas attribuée exclusivement à une catégorie de collectivités. Dorénavant, les départements et les régions ne peuvent exercer que les seules compétences que leur attribue explicitement la loi.
En revanche, il y a deux précisions importantes à souligner : les communes conservent leur clause de compétence générale et certaines compétences restent partagées, c’est-à-dire qu’elles peuvent toujours être exercées par l’ensemble des catégories de collectivités. Ces compétences sont listées à l’article 104 de la loi NOTRe : la culture, le sport, le tourisme, la promotion des langues régionales et l’éducation populaire.
J’en viens à la compétence « développement économique »
Pour ce qui concerne les régions,
Le champ d’action régional en matière économique est principalement traité dans les articles 2 et 3 de la loi NOTRe. S’ils concernent le développement économique au sens propre du terme, ces deux articles ne doivent pas faire oublier que depuis la loi Sapin du 5 mars 2014, les régions ont vu aussi leurs compétences renforcées pour la formation professionnelle et l’apprentissage.
Pour synthétiser, l’article 2 confie à la région la responsabilité exclusive de la définition des orientations en matière de développement économique sur son territoire. Ces orientations sont définies dans le schéma régional de développement économique, d’internationalisation et d’innovation (SRDEII). L’article 3 complète l’article 2 en précisant que la région est désormais seule compétente pour définir les régimes des aides directes et pour décider de l’octroi de ces aides aux entreprises dans la région.
Je vais maintenant développer la portée de ces deux articles.
Le SRDEII définit obligatoirement les orientations de la région relatives aux aides aux entreprises, au soutien à l’internationalisation, aux aides à l’investissement immobilier et à l’innovation des entreprises, à l’attractivité du territoire et au développement de l’économie sociale et solidaire. Il peut également comporter un volet transfrontalier et un volet sur les orientations en matière d’aides au développement des activités agricoles, artisanales, industrielles, pastorales et forestières.
Ainsi, le schéma peut par exemple définir le type de secteur économique ou d’entreprises que la région entend aider en priorité et les instruments de soutien privilégiés (subventions, prêts…)
Les orientations du SRDEII concernant toutes les collectivités infrarégionales, son élaboration doit obligatoirement faire l’objet d’une concertation avec les métropoles et les EPCI à fiscalité propre, ces derniers disposent en effet, en complément des régions, de compétences précises en matière d’interventions économiques sur leurs territoires. J’y reviendrai.
Je veux insister sur ce point : la concertation a lieu en amont et durant la phase d’élaboration du projet de schéma. Une fois élaboré, ce projet doit être présenté et discuté au sein de la CTAP. À l’issue de ces procédures, c’est le conseil régional qui adopte le SRDEII par délibération. Enfin, le schéma devient exécutoire seulement après son approbation par arrêté du préfet de région.
Cette approbation préfectorale a un intérêt majeur. Comme les actes des collectivités infrarégionales et de leurs groupements doivent être compatibles avec le SRDEII, c’est-à-dire qu’ils ne devront pas aller à l’encontre des orientations fondamentales définies dans le schéma, le préfet doit vérifier que la procédure d’élaboration a bien été respectée et que le schéma comporte bien le contenu obligatoire prévu par la loi. C’est ainsi que les orientations des SRDEII pourront avoir un caractère prescriptif.
L’adoption des SRDEII doit intervenir avant le 31 décembre prochain. C’est à souligner car, selon les volontés politiques des nouveaux présidents de région, l’état d’avancement des travaux, et surtout de la concertation, n’est pas la même.
Comme je le disais, la région est donc désormais seule compétente pour définir et octroyer des aides en faveur de la création ou l’extension d’activités économiques (l’intervention des régions peut prendre différentes formes : prestations de services, subventions, bonifications d’intérêts, prêts et avances remboursables) et pour octroyer des aides aux entreprises en difficulté.
Les régions peuvent également désormais prendre des participations au capital des sociétés commerciales sans qu’elles soient soumises à une autorisation préalable par décret en Conseil d’État. C’est un vrai renforcement des prérogatives des régions en la matière.
Pour exercer ces compétences nouvelles, les régions vont disposer de deux nouvelles ressources :
- D’une part, le transfert de certains crédits des conseils départementaux dans le cadre des CLECT pour ce qui concerne les dispositifs départementaux transférés aux régions ;
- D’autre part, l’affectation par l’État de nouvelles ressources avec, comme l’a annoncé le Premier ministre, en 2017 un fonds de 450 millions d’euros consacré au développement économique, fonds qui sera remplacé dès 2018 par une fraction de la TVA.
Pour ce qui concerne les départements
Ils ne sont plus compétents en matière d’interventions économiques de droit commun. Ils conservent uniquement des compétences pour intervenir sur des objets spécifiques s’inscrivant dans le cadre de la solidarité territoriale.
Ainsi, en cohérence avec ce que vient de dire s’agissant des compétences régionales, le département ne peut plus participer au financement des aides et régimes d’aides directes mis en place par la région en faveur de la création ou de l’extension d’activités économiques. Il ne peut plus non plus agir dans le domaine des aides en faveur d’entreprises en difficulté, ni participer au capital des sociétés de garantie.
En conséquence, les départements actionnaires de sociétés d’économie mixte locales ou de sociétés publiques locales d’aménagement intervenant en matière de développement économique sont contraints de céder deux-tiers de leurs parts avant la fin de l’année. Cette cession, dans le silence des textes, est réputée être à titre onéreux, les cessionnaires ne pouvant être qu’une ou un groupement de collectivités territoriales exerçant des compétences en matière de développement économique.
Cela ne signifie pas que le département n’agira plus du tout en matière de développement économique. En effet, au titre de la solidarité territoriale, c’est l’article 94 de la loi NOTRe, le département peut contribuer au financement des projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements, à leur demande.
Je tiens à préciser que cette contribution ne peut toutefois pas avoir pour effet d’apporter indirectement une aide à une entreprise, mais bien à l’EPCI ou à la commune maître d’ouvrage.
Le Département peut aussi, lorsque l’initiative privée est défaillante ou absente, contribuer au financement d’opérations d’investissement en faveur des entreprises de services marchands nécessaires aux besoins de la population en milieu rural, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par des communes ou EPCI à fiscalité propre, et à la demande de ceux-ci.
Enfin, le département peut également, par convention avec la région et en complément de celle-ci, participer, par des subventions, au financement d'aides accordées par la région en faveur d'organisations de producteurs et d'entreprises exerçant une activité de production, de commercialisation et de transformation de produits agricoles, de produits de la forêt ou de produits de la pêche. Ces aides du département ont pour objet de permettre à ces organisations et à ces entreprises d'acquérir, de moderniser ou d'améliorer l'équipement nécessaire à la production, à la transformation, au stockage ou à la commercialisation de leurs produits, ou de mettre en œuvre des mesures en faveur de l'environnement.
Par ailleurs, le département peut toujours agir pour favoriser l’installation ou le maintien de professionnels de santé dans les zones déficitaires et octroyer des aides à l’exploitation de salles de cinéma.
Pour ce qui concerne le bloc communal
L’article 3 de la loi NOTRe dispose que les communes et les EPCI à fiscalité propre sont seuls compétents pour définir les aides ou les régimes d’aides et décider de l’octroi de ces aides sur leurs territoires en matière d’investissement immobilier des entreprises et de location de terrains ou d’immeubles. Auparavant, cette compétence était partagée entre toutes les catégories de collectivités. L’article précise cependant que la région peut participer au financement de ces aides après convention avec la commune ou l’EPCI à fiscalité propre et que la compétence d’octroi de tout ou partie de ces aides peut être déléguée, par convention, au département.
Ces aides peuvent prendre différentes formes : subventions, rabais sur le prix de vente, de location ou de location-vente de terrains nus ou aménagés ou de bâtiments neufs ou rénovés, prêts, avances remboursables ou crédit-bail à des conditions plus favorables que celles du marché. Dans tous les cas, elles doivent respecter les orientations du SRDEII.
Les communes et EPCI à fiscalité propre peuvent toujours intervenir, sans intervention préalable de la région, et donc directement, pour :
- octroyer des aides aux professionnels de santé dans l’objectif de favoriser l’accès aux soins en zones déficitaires ;
- accorder des subventions à des exploitants de salles de cinéma ;
- verser des aides destinées à assurer la création ou le maintien d’un service nécessaire à la satisfaction des besoin de la population en milieu rural ou dans une commune comprenant au moins un quartier prioritaire de la politique de la ville, lorsque l’initiative privée est défaillante ou insuffisante ;
- garantir des emprunts contractés par des personnes morales de droit privé ;
- participer au capital de sociétés de garanties.
Les communes et les EPCI à fiscalité propre ont aussi la possibilité, en complément de la région :
- de participer au financement des aides ou régimes d’aides en faveur de la création ou de l’extension d’activités économiques dans un cadre conventionnel avec la région. Cette dernière peut également déléguer l’octroi de tout ou partie de ces aides aux communes et à leurs groupements ;
- de participer au financement des aides aux entreprises en difficulté décidées par la région, toujours dans le cadre d’un conventionnement.
Il est nécessaire d’apporter une précision sur la question de l’intérêt communautaire pour ce qui concerne la compétence développement économique.
Tout en confiant au bloc local une compétence exclusive en matière d’aide à l’immobilier d’entreprise, la loi NOTRe (notamment ses articles 64 et 66) est venue supprimer la possibilité de définir un intérêt communautaire au sein des compétences économiques obligatoires des différentes catégories d’intercommunalités à fiscalité propre que sont la création, l’aménagement, l’entretien et la gestion des zones d’activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire et aéroportuaire. Dans ces domaines, le transfert obligatoire de la compétence se fera en bloc sans la définition d’un intérêt communautaire qui pourrait nuire à la clarification attendue
En revanche, si la loi NOTRe a élargi les compétences économiques des intercommunalités à la politique locale du commerce et au soutien aux activités commerciales, l’exercice de celles-ci nécessitent la reconnaissance d’un intérêt communautaire.
En tant que rapporteur du projet de loi, j’ai veillé en effet à ce que le législateur préserve la capacité directe des communes à agir sur leur tissu commercial, notamment par des politiques de revitalisation et d’animation des centres urbains et des centres bourgs. Dans ces domaines, les communes sont les plus légitimes et efficaces pour agir en lien avec la rénovation des espaces publics et les règles d’urbanisme.
Enfin, puisque l’économie et le tourisme sont intimement liés, je rappellerai que la promotion du tourisme (dont la création d’offices de tourisme) est devenue une compétence obligatoire de toutes les catégories d’EPCI à fiscalité propre.
Les EPCI sont donc, sur leurs territoires, les acteurs et les outils du développement économique. C’est un vrai défi à relever. Ils doivent se structurer et s’organiser et nous devons avoir en tête que seules 58 % des communautés d’agglomérations et 34 % des communautés de communes ont aujourd’hui une stratégie de développement économique formellement définie.
La loi NOTRe a donc procédé à une clarification inédite de la répartition des compétences des collectivités en matière d’interventions économiques.
Cette clarification, qui reconnaît l’importance de l’action régionale et du bloc communal dans le domaine économique, a le mérite d’offrir de la souplesse. Certains diront que l’objectif de clarification et la recherche de souplesse sont contradictoires. Je ne partage pas ce point de vue. La loi crée les conditions pour que les élus, selon les pratiques et les besoins de leur territoire, aient la possibilité de conventionner, notamment au sein des CTAP, afin de rendre plus efficace l’action publique territoriale dans le domaine du développement économique. En résumé, la loi fixe un cadre d’action simplifié et les conditions pour l’adapter localement. En cela, la loi NOTRe s’inscrit pleinement dans une logique décentralisatrice.
J’espère que vous pardonnerez le caractère technique de mon intervention mais, en la matière, c’est le prix de la précision. Je me tiens évidemment à votre disposition au cours de la table ronde et après pour répondre à vos questions.
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