A l'heure où la plupart des dirigeants des pays occidentaux rivalisent de superlatifs pour professer qu'avec la crise financière « l'ère du secret bancaire est révolue » et qu'il faut « changer le système », le Parlement européen est, lui, passé aux travaux pratiques.
On estime chaque année le montant total de la fraude fiscale dans l'Union européenne à 200 milliards d'euros. Rapportée au budget de l'Union en 2008 (133 milliards d'euros) ou aux montants cumulés des déficits publics dans l'Union européenne, on comprend combien la perte de ces sommes colossales affecte les Etats membres. En effet, l'addition des plans de relance européens approche 1,5 % du PIB de l'Union, là où la fraude fiscale s'établit à 2 % du PIB. L'injection massive d'argent public pour sauver le système bancaire motive donc les Etats à réclamer de solides contreparties aux banques européennes pour recouvrer les recettes fiscales que le secret bancaire permet de leur soustraire. Ce contexte explique que j'ai trouvé une majorité au Parlement européen pour soutenir une politique ambitieuse de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, dont la portée dépasse la révision de la seule « directive épargne ».
Mon rapport propose à l'Union européenne de franchir une étape décisive dans trois domaines.
Le premier consiste à porter un coup direct au secret bancaire par l'abrogation en 2014 du système de retenue à la source encore appliqué par le Luxembourg, l'Autriche et la Belgique. En 2008, la France a reçu des pays pratiquant le secret bancaire 64 millions d'euros au titre des impôts dus sur les intérêts de l'épargne. 38 millions en provenance de la Suisse et 13 en provenance du Luxembourg, principales destinations européennes des résidents français pour leurs placements en épargne. Qui sont-ils ? Combien sont-ils ? Comment vérifier l'exactitude des sommes perçues. Cela échappe à Bercy comme à ses homologues de 24 des 27 Etats membres dont les ressortissants placent tout ou partie de leur épargne dans les pays de l'Union pratiquant le secret bancaire. Les parlementaires européens ont donc décidé que le système d'échange automatique d'information s'applique à tous les Etats. L'engagement de l'Europe à abroger le secret bancaire d'ici à 2014 est aussi un choix pragmatique qui place l'Union en position de force dans ses futures négociations avec la Suisse et tous les pays tiers qui accueillent aujourd'hui les milliards de l'évasion fiscale.
La suite : site des Echos
Victoire ?
Cette tribune libre se termine par "Le Parlement a pris ses responsabilités. La balle est maintenant dans le camp du Conseil européen. Un député socialiste minoritaire en Europe a obtenu l'engagement du Parlement européen en faveur de l'abrogation du secret bancaire d'ici à 2014. Nul doute qu'un chef d'Etat conservateur majoritaire en Europe saura obtenir du Conseil un résultat identique."
Nous avons vu ce qui s'est passé pour l'amendement 138 (HADOPI).
Ce rapport, j'aurais bien aimé le lire. Las, ni au PE ni sur la toile. Je n'ai trouvé que la liste des amendements proposés à la Directive 2003/48/CE. C'est insuffisant pour me construire une opinion.
Même si le Conseil les accepte, l'effet se fera sentir au plus tôt en 2014. Heureusement, c'est une directive avec effet direct (c'est à dire qu'il n'y a pas besoin de la transposer dans les droits nationaux) sans quoi il y aurait encore des retards à l'application.
Bref, pour moi, le plaisir est mitigé. C'est une petite victoire parce que quelque chose veut se faire, MAIS rien n'est encore fait et SI cela se fait, pas avant 2014.
Rédigé par : k.tasse.trof | 29 avril 2009 à 22:07