Le remodelage de la carte des circonscriptions législatives pour le scrutin de 2012 se révèle être une vaste opération de redécoupage électoral concernant près de 60 % des sièges de députés. Selon le projet définitif soumis au conseil des ministres, mercredi 29 juillet, 243 circonscriptions, sur 577, ont été préservées par Alain Marleix, le secrétaire d'Etat aux collectivités locales, qui a piloté ce nouveau schéma. Le redécoupage concerne au total 64 départements métropolitains et les 9 départements et collectivités d'outre-mer.
Conseiller de Charles Pasqua, ministre de l'intérieur, lors du précédent redécoupage de 1986, M. Marleix se défend de toute "manipulation politique" comme l'en accuse le Parti socialiste.
Imposé par le Conseil constitutionnel en 2007, l'exercice a, assure-t-il, a été guidé par les seuls impératifs du rééquilibrage démographique, sur la base d'une moyenne de 125 000 habitants par circonscription. Dans son avis rendu jeudi 23juillet, le Conseil d'Etat avait préconisé que les écarts ne puissent se situer en dehors des limites de 90000et 135000 habitants, pour éviter des disparités trop importantes.
Sur les 33 circonscriptions métropolitaines supprimées dans 27 départements, 10 sont détenues par l'UMP, 19 par le PS, 2 par les Verts et une par le PCF. Dans cinq départements (Allier, Charente, Nièvre, Hautes-Pyrénées et Haute-Vienne), le PS perd un siège alors qu'il les détenait tous. La Creuse et la Lozère ne seront plus représentées que par un seul député. En contrepartie, 21 circonscriptions ont été créées dans 14 départements, auxquelles s'ajoutent 1 siège à Saint-Barthélemy et 11 autres pour les Français de l'étranger.
SUBTILS ÉQUILIBRES
Le projet originel du gouvernement a été corrigé à la suite des propositions de la commission présidée par Yves Guéna, ancien président du Conseil constitutionnel. Avec les recommandations du Conseil d'Etat, 34 circonscriptions restaient litigieuses. A la suite des derniers arbitrages, le secrétaire d'Etat a choisi de ne pas tenir compte de ces recommandations dans 20 circonscriptions. Pour justifier le maintien de son redécoupage initial, M.Marleix n'hésite pas à faire état de subtils équilibres politiques. C'est le cas en faveur de la majorité UMP, dans le Tarn. Mais ce pourrait être aussi au profit de la gauche, assure-t-il, du PS dans la Loire, et du PCF en Seine-Saint-Denis.
Sur d'autres cas plus sensibles, le gouvernement n'a pas varié, dans l'Ain, la Saône-et-Loire, la Mayenne, la Loire-Atlantique, les Landes, la Dordogne. Des changements "à la marge" ont été réalisés dans le Loir-et-Cher, l'Aube, le Val d'Oise. A Paris dans le 17e arrondissement, où la circonscription d'Annick Lepetit (PS) avait été modifiée avec l'ajout de deux cantons fortement marqués à droite, les contours ont été partiellement rétablis.
Dans cet exercice délicat où le transfert d'un canton ou de quelques bureaux de vote suffit à faire basculer le résultat d'un scrutin, le PS continue de crier au scandale. "En appliquant ce redécoupage aux résultats des élections législatives de 2007, la droite aurait obtenu 30 sièges de plus et décrocherait 24 des 33 nouvelles circonscriptions", assure Christophe Borgel, secrétaire national chargé des élections. Le PS a calculé que la gauche devrait recueillir 51,3 % des suffrages pour obtenir une majorité à l'Assemblée alors que l'UMP décrochera la sienne avec moins de 48,7 %.
Au MoDem, assez peu concerné avec 3 députés, Jean-Marie Vanlerenberghe, sénateur et maire d'Arras, déplore qu'en l'absence de toute proportionnelle, le système "ne soit pas équilibré et représentatif de toutes les familles politiques." Dans une ordonnance spécifique concernant les 11 sièges des Français de l'étranger, le gouvernement envisage d'expérimenter le vote électronique. Cette disposition devrait favoriser le vote dans des circonscriptions étendues à l'échelle d'un ou plusieurs continents. La première d'entre elles inclut ainsi le Canada et les Etats-Unis, tandis que la 11e s'étend de la Biélorussie à la Papouasie, avec l'Inde, la Chine et le Japon. Une loi de ratification devrait être présentée au Parlement à l'automne. Le PS envisage de saisir le Conseil constitutionnel.
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