Lors de sa réunion du 27 octobre 2010, la Commission des Lois a examiné la mission budgétaire "relations avec les collectivités locales" dont l'examen en séance est prévu le 5 novembre prochain. A cette occasion, j'ai - au nom du groupe SRC - interpellé Alain Marleix, Secrétaire d'Etat à l'Intérieur et aux Collectivités Locales, sur les craintes que nous entretenons au sujet de la situation financière des collectivités locales;
Je lui ai notamment rappelé que nous ne pouvons pas délier la réforme des collectivités et la politique budgétaire que mène le Gouvernement. C'est une véritable entreprise d'étranglement des collectivités qui est engagée alors qu'elles ne représentent que 10% de la dette publique.
Le compte rendu de la séance : cliquer ici
Vous pouvez aussi prendre connaissance de mon intervention écrite dans la suite de cet article :
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"Monsieur le Secrétaire d'Etat,
Le budget que nous nous présentez aujourd'hui est conforme aux différentes annonces qui ont été faites, il y a plusieurs semaines, par le Président de la République à l'occasion notamment de la Conférence des Déficits Publics.
C'est un budget qui suscite des inquiétudes et des interrogations.
Après que le Ministre du Budget l'ait annoncé, vous nous avez confirmé que les dotations aux collectivités locales seront gelées et cela pourrait se traduire, selon le Secrétaire Général de l'AMF, par une baisse de la DGF notamment pour 20 à 25 000 communes. Tout est dit quant à la brutalité de votre procédé vis à vis des collectivités locales dont vous savez pourtant, comme nous, qu'elles ne sont pas responsables de la situation catastrophique des comptes publics. La part de la dette publique à leur imputer est stable et inférieure à 10% du total de la dette publique.
Si nous condamnons la violence de votre politique à l'égard des collectivités, nous souhaitons aussi souligner un certain nombre de points et vous faire part de nos interrogations.
- La fusion de la Dotation Globale d'Equipement et de la Dotation de Développement Rural en une Dotation unique d'Equipement des Territoires Ruraux pose de nombreuses questions sur les critères d'éligibilité à cette dotation et le périmètre exact des actions qu'elle pourra financer. Questionnement d'autant plus fort que d'ores et déjà, les crédits alloués à la DETR pour les communes sont en baisse de 8 millions d'euros par rapport à 2010. La hausse d'environ 50 millions d'euros de la Dotation de Solidarité Rurale (DSR) ne compensera pas les risques courus par ailleurs par les collectivités.
- Lorsque le Gouvernement affirme que les dépenses des collectivités ont progressé, hors transferts de compétences, de 40% entre 1983 et 2008, il semble oublier qu'il évoque une période de 25 ans au cours desquels l'inflation a été en moyenne assez largement supérieure à 2% par an. La hausse mécanique des prix, à ce rythme et sur une période aussi longue relativise la hausse affichée.
C'est encore plus vrai lorsque l'on sait, et les travaux de l'AMF sur le « panier du maire » le montrent, que la hausse moyenne de l'indice des prix propre aux collectivités locales est encore plus forte.
Il oublie aussi que, indépendamment des transferts de compétences nouvelles, les collectivités ont du pallier un désengagement de l'Etat dans ses propres compétences.
- Lors que vous affirmez que les dotations de l'Etat aux collectivités ont augmenté en moyenne de 2.3% par an, soit plus que l'inflation. Vous oubliez là encore un élément important qui est que cette hausse des dotations de l'Etat est en grande partie due à la compensation des allégements de fiscalité locale que les Gouvernements avaient eux-mêmes décidé aux dépens des collectivités et en tout cas de leur autonomie fiscale.
En 2010, les dégrèvements de fiscalité locale accordés par le Gouvernement, sur les recettes des collectivités, sont de 19 milliards et les compensations d'exonérations de 2 milliards. Cela représente donc 21 milliards soit plus de 20% des concours de l'Etat aux collectivités.
Le gel à proprement parlé ne s'applique en réalité que sur un peu plus de 50 milliards que concerne la mission budgétaire "relations avec les collectivités". (sur les 98 milliards de versements de l'Etat aux collectivités locales). Il faut aussi préciser que le produits des amendes de polices (soit 640 millions d'euros) pour permettre aux collectivités d'en tirer le plus grand profit (au risque de l'impopularité). De même, la Dotation de Compensation de la Réforme de la Taxe Professionnelle est traitée en dehors de ce périmètre gelé pour environ 3 milliards d'euros. Enfin, le FCTVA, dont le montant dépend du niveau d'investissement des collectivités, n'est pas dans l'enveloppe normée.
Outre ces trois points, nous avons aussi de sérieuses inquiétudes sur d'autres aspects du PLF qui touchent directement aux collectivités locales et à leur développement.
- L'article 65 du projet de loi de finances vient réduire les avantages accordés aux entreprises et aux associations installées dans les Zones de Revitalisation Rurale. Il est prévu par le texte de limiter les exonérations de charge à 10 emplois par structures. Cela est particulièrement dangereux pour le secteur associatif du service à la personne, que ce soit les associations salariant des aides à domicile que les établissements d'accueil de personnes âgées.
- La baisse de 12% des crédits d'intervention de l'Etat dans le domaine de la politique de la ville, via les CUCS, est un autre signe de baisse des moyens et de risque d'étranglement des collectivités et des territoires.
Je ne vous cache pas qu'il sera difficile au Gouvernement, d'apporter des réponses rassurantes. Pour une raison simple, il n'y a rien en l'état des textes qui puissent rassurer les élus locaux sur l'avenir de leurs collectivités.
Tous les engagements à un réexamen ultérieur des textes adoptés ne sont, en plus, pas crédibles dans la mesure où le Gouvernement n'a pas véritablement tenu sa parole pour la clause de revoyure promise au Sénat en matière de Taxe Professionnelle.
Par ailleurs, l'incertitude et le flou incroyable dans lequel sont votées les politiques d'abattement des communes et des EPCI à la suite du transfert de la part départementale de taxe d'habitation anciennement perçue par le Département, viennent renforcer ce sentiment d'incertitude et le manque de visibilité.
Enfin, personne ne peut oublier le contexte législatif dans lequel nous examinons ce projet de budget 2011.
La réforme des collectivités locales, dont l'examen en commission mixte paritaire a été repoussé au 3 novembre, est un réel sujet d'inquiétude.
Les articles 35, 35bis, ter et quater ont été réintroduits dans le texte lors de l'examen à l'Assemblée Nationale alors que le Sénat les avait écarté à une très large majorité rassemblant au-delà des clivages politiques. Les inquiétudes suscitées sont de plusieurs natures.
La première est que les départements et les régions ne pourront plus intervenir en soutien aux communes en dehors de leurs compétences propres départementales et régionales, sauf si l'on arrive à prouver « l'envergure départementale ou régionale » du projet.
C'est dire combien il sera difficile aux départements et aux régions de continuer à aider autant les communes et les intercommunalités.
La deuxième est que pour toutes les communes de plus de 3 500 habitants (et les EPCI de plus de 50 000), il ne sera plus possible de cumuler une aide de la Région et une aide du Département. Là encore, c'est préoccupant dans la mesure où souvent ces communes de plus de 3 500 habitants exercent les fonctions de villes centres de bassins de vie et doivent faire face à des besoins importants, notamment en matière d'équipements culturels ou sportifs.
Enfin, la troisième chose est qu'il sera obligatoire pour les communes de plus de 3 500 habitants (et les EPCI de plus de 50 000) d'apporter au minimum 30% du financement de tous les projets qu'elles porteront.
Les seules dérogations concernant la rénovation urbaine, le patrimoine classée et les travaux liés à des catastrophes naturelles pour lesquels le Préfet pourra accorder une dérogation.
Quand vous ajoutez à cela l'absence d'une véritable prise en compte des effets de l'acte 2 de la décentralisation de 2004 et notamment la non compensation intégrale des charges transférées en même temps que les compétences, l'explosion des dépenses sociales comme l'APA qui pèsent sur les budgets des Conseils Généraux, le Gouvernement apparaît comme le premier responsable de la situation critique de certains départements et peut-être bientôt de certaines régions.
A ce sujet, la perte d'autonomie fiscale de ces deux collectivités, qu'entraîne la réforme des collectivités, vous rendra encore plus responsable des difficultés rencontrées.
Un certain nombre de décisions de justice soulignent cette responsabilités et les raisons de ces situations de la crise financière que vivent certaines collectivités. Nous le disons pour notre part depuis longtemps.
En conclusion, l'effet cumulé de votre politique budgétaire annoncée comme pluri-annuelle et de la réforme des collectivités, sera un véritable étranglement des collectivités locales.
Les collectivités représentant moins de 10% du total de la dette publique. Elles ont à exercer des missions que l'Etat n'assure plus. Elles doivent faire face à des besoins sociaux croissants et une demande de services accentués par les désengagements de l'administration centrale. Or, aujourd'hui, elles sont considérées et traitées comme les responsables de la crise des finances publiques. La mission budgétaire que vous nous présentez est l'illustration d'une politique est injuste et dangereux pour l'économie lorsque l'on sait que les collectivités représentent aussi 75% de l'investissement public."
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