Le Monde – Mardi 7 octobre 2014
Maires, présidents de régions et de départements seraient des paniers percés, incapables de tenir les finances de leurs collectivités. C’est, selon plusieurs élus, le sens d’un rapport de la Cour des comptes dont Le Monde.fr s’est procuré une synthèse et dont le JDD a dévoilé les grandes lignes le 5 octobre. Les élus locaux rétorquent que la hausse de leurs charges est en grande partie décidée par l’État (réforme des rythmes scolaires, emplois d’avenir, application de la hausse des cotisations retraites…).
Alors que la France a pris des engagements de réduction des déficits, les dépenses des communes, intercommunalités, départements et régions ont progressé en 2013 de 3,4%. En ce qui concerne les dépenses de fonctionnement, « tous les échelons sont pointés du doigt » indique le document. Toutefois, le bloc communal est en charge à lui seul de 76% des dépenses de personnel. Dans les intercommunalités elles ont « progressé de plus de 7% et celles des communes de 2,6%, signe d’une mutualisation en panne ».
Dans le même temps, les recettes des collectivités patinent avec seulement 1% d’augmentation. Ainsi, elles ont accusé un déficit de 3,7 milliards d’euros en 2012 et 9,2 milliards en 2013.
« DISPARITÉ DES SITUATIONS »
Les élus locaux n’apprécient pas le recadrage des magistrats. « C’est un rapport stigmatisant, blessant pour les élus », s’indigne Olivier Dussopt, maire socialiste d’Annonay (Ardèche), député socialiste et président de l’Association des petites villes de France. « Le rapport ne tient pas compte de la disparité des situations. Si, en effet, certains élus ont engagé des dépenses somptuaires et scandaleuses, ces situations demeurent exceptionnelles. Le décalage entre le compte rendu et la réalité du terrain est considérable. »
La Cour pointe notamment la masse salariale des collectivités territoriales, qui a augmenté de 3,1% en 2013 après avoir déjà crû de 3,5% en 2012. Les dépenses d’investissement ont, elles, augmenté de 8,1% en 2013.
« Les collectivités ne sont pas maîtresses de leur masse salariale », juge M. Dussopt. « Qui a décidé de la mise en place de la réforme des rythmes scolaires par les communes, transféré l’instruction des droits des sols au bloc communal, la revalorisation des personnels de catégories C ? », interroge le parlementaire.
NOUVELLE HAUSSE DES DÉPENSES EN 2014
« C’est l’État », répond André Laignel, maire socialiste d’Issoudun (Indre) et président du Comité des finances locales. « Le chiffre d’une hausse de 3,1% des dépenses de personnel est exact. Il provient de l’Observatoire des finances locales, précise-t-il. Il n’illustre aucune dérive manifeste des collectivités, mais le résultat d’une augmentation prévisible des charges : hausse du smic, des cotisations retraite, des salaires, due à l’évolution indicielle des personnels via leur ancienneté ou leur montée en grade. »
Les dépenses de personnel continueront d’augmenter en 2014, prévoit l’Observatoire. En effet, de « nouvelles charges » prévues par les textes de lois sur la fonction publique auront alors pour conséquence une nouvelle hausse des dépenses de « 3 à 4% », précise l’étude publiée en juillet. Au final, « les décisions des élus ne portent environ que sur 0,2% de la hausse de dépenses de personnel pointée par le Cour des comptes », estime M. Laignel.
Pour plusieurs élus, les réformes structurelles qui permettront une baisse des dépenses ne seront possibles qu’après une profonde réforme des collectivités territoriales, qui se fait toujours attendre. Pour Olivier Dussopt, « les élus locaux ne font qu’appliquer la loi ».
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