Validée par le conseil constitutionnel, la loi portant réforme de l'élection présidentielle suscite des réactions mais souvent sur la base d'affirmation erronées volontairement ou pas. J'ai voté cette loi pour les raisons suivantes qui peuvent rassurer celles et ceux qui s'inquiètent.
S’agissant des parrainages, à l’heure actuelle la loi se borne à prévoir que les présentations des candidats à l’élection présidentielle sont « adressées » au Conseil constitutionnel, sans préciser par qui, ni sous quelle forme.
La proposition de loi organique vise donc à donner suite aux observations du Conseil constitutionnel. Ainsi, les présentations des candidats devront être « rédigées sur des formulaires, revêtues de la signature de leur auteur et adressées au Conseil constitutionnel par leur auteur par voie postale, dans une enveloppe prévue à cet effet, ou par voie électronique. Les formulaires et les enveloppes sont imprimés par les soins de l’administration conformément aux modèles arrêtés par le Conseil constitutionnel ». Cette disposition est indéniablement gage de simplification et d’une sécurisation du processus de transmission des parrainages.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel appelle depuis longtemps à faire évoluer notre législation pour permettre la publication de l’ensemble des parrainages. Au nom de la transparence de la vie publique, il est souhaitable de connaître tous les parrains des candidats et les habitants d’une commune sont en droit de connaître le candidat parrainé par leur maire.
Ainsi, au fur et à mesure de la réception des parrainages, « le Conseil constitutionnel rend publics, au moins deux fois par semaine, le nom et la qualité des citoyens qui ont valablement présenté des candidats à l’élection présidentielle. […] Huit jours au moins avant le premier tour de scrutin, le Conseil constitutionnel rend publics le nom et la qualité des citoyens qui ont valablement proposé les candidats ». Dorénavant, aucun candidat ne pourra faire planer le doute sur sa capacité ou non à réunir les parrainages nécessaires. Cette disposition est source de transparence.
Enfin, l’article 4 de la proposition de loi organique modifie à la marge les règles d’accès aux médias audiovisuels des candidats à l’élection présidentielle.
Dans les mois qui précèdent chaque élection présidentielle, il revient au CSA de veiller au respect du pluralisme dans les médias audiovisuels. Les règles en la matière ont été posées par cette autorité dans une délibération n° 2011-1 du 4 janvier 2011 relative au principe de pluralisme politique dans les services de radio et de télévision en période électorale et dans une recommandation n° 2011-3 du 30 novembre 2011 à l’ensemble des services de radio et de télévision concernant l’élection du Président de la République.
En pratique, trois périodes sont à distinguer pendant une campagne d’élection présidentielle.
La première période, dite « préliminaire », débute à une date fixée par le CSA – le 1er janvier 2012 pour la dernière élection présidentielle – et s’achève la veille (soit le 19 mars 2012) de la publication au Journal officiel de la liste des candidats. Les médias audiovisuels doivent alors respecter, à l’égard des candidats déclarés ou présumés, le principe d’équité dans la répartition des temps de parole (ils correspondent à la diffusion de toutes les interventions d’un candidat ou de ses soutiens) et des temps d’antenne (ils correspondent aux temps de parole et à l’ensemble des éléments éditoriaux consacré à un candidat ou à ses soutiens). Ce principe se caractérise par sa plus grande souplesse d’application qu’une stricte règle d’égalité.
La deuxième période, dite « intermédiaire », s’étend de la date de publication au Journal officiel de la liste des candidats à la veille de l’ouverture de la campagne officielle (soit, lors de la dernière élection, du 20 mars au 8 avril 2012). Les candidats y bénéficient de l’égalité des temps de parole et de l’équité des temps d’antenne. Avant l’élection de 2007, cette période ne durait que quelques jours : du fait de la réforme de 2006, qui a avancé la date limite de réception par le Conseil constitutionnel des parrainages des candidats, la publication de la liste des candidats intervient plus tôt qu’auparavant. En 2012, la période intermédiaire a ainsi duré vingt jours, soit près de trois semaines.
La troisième période, celle de la campagne électorale au sens strict, court du deuxième lundi précédant le premier tour de scrutin jusqu’à la veille de ce dernier à minuit (soit, en 2012, du 9 au 20 avril). Le principe d’égalité s’applique alors aussi bien au temps d’antenne qu’au temps de parole, en application de l’article 15 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 portant application de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel. Il en va de même pour la campagne en vue du second tour.
En 2007, puis en 2012, la période intermédiaire a fait l’objet de nombreuses critiques. En faisant coexister égalité des temps de parole et équité des temps d’antenne, la période intermédiaire est source de complications, tant pour les médias que pour certains candidats.
Pour les médias, le nombre important de candidats (douze en 2007, dix en 2012) rend difficile l’application d’une stricte égalité de temps de parole, dissuadant certaines chaînes d’organiser des débats et conduisant in fine à une réduction du temps médiatique consacré à la campagne présidentielle.
Au total, comme le relevait le CSA dès 2007, « la période intermédiaire semble avoir inutilement complexifié le dispositif normatif ». Après avoir réitéré ce constat en 2012, le CSA a proposé, le 10 septembre 2015, une « esquisse de rédaction » visant à poser un principe général d’équité, pendant cette période, dans la loi du 6 novembre 1962 précitée.
Pour remédier à ces difficultés, il n’apparaît pas souhaitable de supprimer ou de réduire la période intermédiaire, en raccourcissant le délai entre la publication de la liste des candidats et le début de la campagne officielle. Ce délai a, au contraire, été augmenté en 2006, afin non seulement de faciliter la confection, le contrôle et l’acheminement du matériel électoral, mais aussi de réduire la période d’incertitude pendant laquelle le CSA doit faire respecter le pluralisme à l’égard de candidatures déclarées ou présumées, mais non encore officiellement établies.
La plupart des suggestions des différents organismes de contrôle convergent pour, tout en laissant inchangés les différents délais, substituer le principe d’équité à la règle de l’égalité des temps de parole. C’est la raison pour laquelle l’article 4 de la proposition de loi organique dispose qu’à compter « de la publication de la liste des candidats et jusqu’à la veille du début de la campagne, les éditeurs de services de communication audiovisuelle respectent, sous le contrôle du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le principe d’équité en ce qui concerne la reproduction et les commentaires des déclarations et écrits des candidats et la présentation de leur personne ».
Ce principe d’équité repose à la fois sur la représentativité des candidats, appréciée, en particulier, en fonction des résultats obtenus aux plus récentes élections par les candidats ou par les partis et groupements politiques qui les soutiennent et en fonction des indications de sondages d’opinion, mais également sur la contribution de chaque candidat à l’animation du débat électoral.
En revanche, et je souhaite insister sur ce point, pendant la campagne électoral au sens strict, le principe d’égalité s’applique toujours aussi bien au temps d’antenne qu’au temps de parole.
De mon point de vue, l’article 4 ne remet donc pas en cause le caractère démocratique de l’élection présidentielle.
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