Dans l’attente d’une directive européenne offrant un cadre juridique stable à la protection des lanceurs d’alerte, nous avons, avec mes collègues de la majorité à l’Assemblée nationale, pris l’initiative de renforcer les dispositions du chapitre 2 relatif aux lanceurs d’alerte du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dit Sapin 2, lors de son examen en première lecture qui s’est achevé par son adoption le 14 juin dernier.
L’article 6 A du projet de loi donne une définition du lanceur d’alerte : c’est « une personne qui révèle, dans l’intérêt général et de bonne foi, un crime ou un délit, un manquement grave à la loi ou au règlement, ou des faits présentant des risques ou des préjudices graves pour l’environnement ou pour la santé ou la sécurité publiques, ou témoigne de tels agissements. Il exerce son droit d’alerte sans espoir d’avantage propre ni de volonté de nuire à autrui. ». Cet article exclut du périmètre de l’alerte ce qui relève du secret de la défense nationale, du secret médical ou du secret des relations entre un avocat et son client.
L’article 6 C précise que l’alerte « peut être portée à la connaissance de la personne de confiance désignée par l’employeur ou, à défaut, du supérieur hiérarchique direct ou de l’employeur. Si aucune suite n’est donnée à l’alerte dans un délai raisonnable, celle-ci peut être adressée à l’autorité judiciaire, à l’autorité administrative, au Défenseur des droits, aux instances représentatives du personnel, aux ordres professionnels ou à toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date de l’alerte se proposant par ses statuts d’assister les lanceurs d’alerte. À défaut de prise en compte par l’un des organismes mentionnés au deuxième alinéa ou en cas d’urgence, l’alerte peut être rendue publique. ».
Afin de protéger le lanceur d’alerte, l’article 6 E dispose qu’il « ne peut, pour ne peut, pour ce motif, être écarté d’une procédure de recrutement, de l’accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, ou faire l’objet d’un licenciement, d’une sanction, d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération ou d’évolution professionnelle, ou de toute autre mesure défavorable, dès lors que le Défenseur des droits a estimé que l’alerte avait été émise de bonne foi. ». Toute décision prise en méconnaissance de cet article est nulle de plein droit.
En outre, une juridiction pourra prescrire de réintégrer toute personne ayant fait l’objet d’un licenciement, d’un non-renouvellement de son contrat ou d’une révocation en méconnaissance de l’article 6 E. Par ailleurs, l’article 6 FB stipule qu’en cas « de rupture de la relation de travail résultant d’une alerte, le salarié peut saisir le conseil des prud’hommes, statuant en la forme des référés. Le conseil des prud’hommes statue dans les vingt et un jours suivant la saisine. Il peut ordonner le maintien du salarié dans l’entreprise ou, en cas de refus du salarié, peut ordonner le maintien du salaire jusqu’au prononcé du jugement. ».
L’article 6 FC punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende toute personne qui fait obstacle, de quelque façon que ce soit, à l’exercice du droit d’alerte.
L’article 6 F est particulièrement important puisqu’il autorise le Défenseur des droits à pouvoir accorder, sur demande du lanceur d’alerte, une aide financière destinée à la réparation des dommages moraux et financiers que celui-ci subit pour ce motif et à l’avance des frais de procédure en cas de litige relatif à l’application de l’article 6 E. Son montant est déterminé en fonction des ressources du lanceur d’alerte et de la mesure de représailles dont il fait l’objet lorsque celle-ci emporte privation ou diminution de sa rémunération.
Je souhaite dorénavant que les sénateurs préservent ses dispositions. Je suis également convaincu qu’elles peuvent être encore améliorées. Nous y veillerons avec mes collègues de la majorité lors de la suite de l’examen parlementaire du projet de loi.
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