Mardi 8 novembre, plusieurs organisations syndicales représentatives de la fonction publique hospitalière et des organisations professionnelles d’infirmiers libéraux et salariés d’établissement ont manifesté pour dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail et les pressions budgétaires. Ce sont des métiers extrêmement difficiles, et je peux en témoigner comme président du conseil de surveillance d’Annonay. La nécessité de redresser les comptes sociaux entraîne des mesures de régulation budgétaire qui rendent difficile leur tâche pour faire face à des besoins toujours plus forts, et qui d’ailleurs ne relèvent pas toujours du secteur hospitalier.
Sous-effectif, fatigue, heures supplémentaires sont le lot quotidien des soignantes et soignants. Pourtant, depuis 2012, nous ne ménageons pas nos efforts pour conforter l’hôpital public. Les mesures présentées ci-dessous sont utiles, et nous avons même créé 31 000 postes. C’est surement encore insuffisant mais cela va dans le bon sens.
Il ne faut pas oublier ou effacer ce qui a été fait, mais s’appuyer dessus pour continuer à avancer. Il faut entendre les difficultés du personnel hospitalier et aller plus loin encore dans les années qui viennent. Cela ne sera pas possible avec celles et ceux qui ne jurent que par la libéralisation et la privatisation de la médecine, et encore moins avec ceux qui annoncent vouloir supprimer 300, 500 et parfois même 600 000 emplois dans la fonction publique.
Je soutiens le personnel hospitalier. Et en même temps, je veux aussi rappeler ce qui a été fait depuis quatre ans. Ce sont les bases sur lesquelles il faut continuer à avancer.
Depuis 2012, plusieurs avancées ont été obtenues :
- Rétablissement du service public hospitalier autour d’un bloc d’obligations très concrètes, comme l'accessibilité financière, la permanence de l'accueil et l'égalité d'accès aux soins. C’est aussi un enjeu de transparence. Chaque patient qui se rend à l’hôpital doit savoir immédiatement à quel type d’établissement il s’adresse et choisir librement et de façon éclairée celui dans lequel il souhaite être hospitalisé. C’est enfin reconnaitre l’implication des hospitaliers pour le service public.
- Fin du financement basé sur la seule tarification à l’activité (T2A) qui fait de la productivité le premier élément justifiant une prise en charge des patients. C’est un enjeu de survie pour les hôpitaux de proximité qui remplissent des missions spécifiques et sont indispensables dans nos territoires. C’est ainsi que 243 établissements bénéficient désormais d’un modèle de financement mixte incluant une dotation forfaitaire annuelle indépendante de leur activité.
- Priorisation des moyens financiers : l’hôpital a bénéficié de près de 10 milliards d’euros de plus entre 2012 et 2017. Ce sont des moyens considérables qui ont été apportés en plus, chaque année du quinquennat.
- Augmentation des effectifs hospitaliers : le nombre de postes de soignants à l’hôpital a augmenté. Ce sont ainsi 31 000 postes de plus qui ont été créés depuis 2012 : 26 000 postes d’infirmiers, 3 000 postes de médecins et 2 000 postes d’aides-soignants. Le plan de suppression de 22 000 postes n’était fondé que sur un calcul théorique de la part d’un journaliste du magazine Challenges en 2015.
Revalorisation des salaires :
- Le Gouvernement a revalorisé tous les salaires des fonctionnaires, en augmentant la valeur du point d’indice qui n’avait pas évolué depuis 2010 (pour un coût de 589 millions d’euros), en augmentant spécifiquement les plus bas salaires (pour un coût total de 450 millions d’euros) et en améliorant les carrières de tous les agents.
- Les revalorisations « parcours professionnels carrières et rémunérations » (PPCR) sont des mesures qui, à compter de cette année, et jusqu’à 2020, vont permettre d’augmenter la rémunération de l’ensemble des catégories des personnels administratifs et soignants, et d’intégrer des primes dans leur traitement, améliorant ainsi leurs retraites. Cela représente un coût de 684 millions d’euros. Ce qui représentera, pour les infirmiers, une augmentation annuelle de 613 euros brut en 2019.
- En juillet 2015 les salaires des infirmiers et des cadres de soins ont été revalorisés à hauteur de 250 à 500 euros net/an (selon l’ancienneté et le niveau de spécialisation), pour un coût total d’environ 70 millions d’euros.
- Les grilles salariales des sages-femmes qui valorisent désormais la diversité de leurs activités, notamment pour celles qui font de l’expertise clinique ou de la coordination, ont été revues. Les étudiants sages-femmes seront désormais rémunérés pour leurs stages de formation clinique (4ème et 5ème année), comme les étudiants en médecine.
En outre, l’hôpital public se transforme :
- L’évolution de l’hôpital n’est pas une restructuration pour répondre à des objectifs comptables, mais une transformation pour s’adapter aux nouveaux modes de prise en charge avec le développement de l’ambulatoire, de l’hospitalisation à domicile et l’évolution des technologies diagnostiques et thérapeutiques. C’est pourquoi, on observe à la fois une réduction du nombre de lits de chirurgie (- 2 300 lits depuis 2013), et une augmentation du nombre de places (+ 1 400) pour les patients accueillis en ambulatoire ou en hospitalisation à domicile.
- La mise en place des Groupements hospitaliers de territoires (GHT) est l’une des mesures les plus ambitieuses et les plus structurantes de la loi de modernisation de notre système de santé. Cette réforme est une composante essentielle de la politique conduite depuis 2012 pour garantir l’accès aux soins à tous les Français et réduire les inégalités territoriales de santé. Il s’agit de faire travailler entre eux les hôpitaux d’un même territoire, autour d’un projet médical partagé, pour permettre à chaque Français d’avoir accès à une offre de soins adaptée et structurée. La coopération entre les établissements d’un même territoire est renforcée, tout en préservant l’autonomie, les spécificités et l’histoire de chaque établissement.
- L’hôpital se modernise : développement de la télémédecine, partage des systèmes d’information entre établissements d’un même GHT pour que tous les professionnels aient accès aux données de leurs patients, quel que soit le lieu de prise en charge, etc. Cette coopération renforcée stimulera aussi la recherche et l’innovation pour faire progresser, in fine, la qualité des soins.
- Ces évolutions structurelles ont un impact sur les organisations de travail. Il est indispensable d’accompagner les agents dans le cadre de ces transformations, qui peuvent être sources d’instabilité et d’inquiétude, facteur de « malaise » pour les salariés. La manière dont se mènent ces transformations dans un hôpital est évidemment essentielle. C’est pourquoi Marisol Touraine annoncera dans quelques semaines une stratégie nationale pour l’amélioration de la qualité de vie au travail à l’hôpital. Elle sera globale, elle ne concernera pas uniquement les infirmières ou uniquement les médecins, mais concernera l'ensemble de ceux qui travaillent à l'hôpital. Elle sera impulsée au niveau national et il sera demandé aux managers hospitaliers d’amplifier leurs politiques d’accompagnement du changement, de renforcer la conciliation vie professionnelle/vie privée et de mieux dépister, prendre en charge et suivre les risques psychosociaux.
Enfin, plusieurs dispositions ont été annoncées lors du comité interministériel aux ruralités le 20 mai dernier, qui s’est tenu en Ardèche, pour lutter contre les déserts médicaux :
- Les jeunes médecins seront encouragés à exercer à l’hôpital public dans les zones peu denses par l’octroi d’une prime d’engagement pour cinq ans dans des hôpitaux en territoires fragiles. Ils auront aussi la possibilité d’un exercice partagé entre la ville et l’hôpital, ou entre un hôpital de proximité et un centre hospitalier universitaire. Par ailleurs, une prime d’exercice territorial sera créée pour les médecins qui s’engagent dans la mise en œuvre d’un projet médical partagé afin de conforter les groupements hospitaliers de territoire.
- Conclusion entre 2017 et 2018 de 800 contrats d’engagement de service public supplémentaires pour atteindre 2 550 installations de jeunes praticiens dans les territoires à faible densité médicale.
- Introduction d’une modulation régionale du numerus clausus pour les études de médecine afin d’améliorer la répartition territorial des médecins par une action sur la formation initiale en fidélisant les étudiants dans les territoires en tension.
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