Je suis signataire de la proposition de loi n° 357 déposée au nom du groupe SRC par mon collègue de la Dordogne, Germinal Peiro. Cette proposition vise à étendre le régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO) aux conjoints et aides familiaux dans l'agriculture. Son objectif est d'assurer un niveau de revenu décent à toutes celles et ceux qui ont contribué à la vie d'une exploitation agricole. Malheureusement, avant le vote du 26 janvier, le Gouvernement et sa majorité se sont opposés à ce texte.
Cette proposition a été discutée le 21 janvier mais votée que le 26 et rejetée par 271 voix contre 245. En effet, comme à chaque fois que l'opposition dépose un texte, le Gouvernement demande l'application du vote bloqué qui renvoie toute décision à un seul et unique vote, à une date qu'il choisit, sans permettre aux députés de se prononcer article par article et amendement par amendement comme le prévoit la forme classique des débats.
La loi n° 2002-308 tendant à la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles du 4 mars 2002 a constitué une avancée sociale fondamentale pour le monde agricole. Issue d’une initiative du législateur, la retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles (RCO) s’est inscrite dans un mouvement de fond en faveur de la justice sociale que le Gouvernement de gauche né des élections législatives de 1997 a accéléré très fortement. La politique menée entre 1997 et 2002 a visé l’augmentation du niveau des pensions des retraites du secteur agricole. Un plan quinquennal a été mis en œuvre par approche frontale pour enfin parvenir au vieil objectif de « parité sociale » en matière de retraites, trop longtemps attendu.
L’ensemble du plan de revalorisation des petites retraites agricoles, qui a permis d’atteindre l’objectif de 75 % du smic en 2002, a été accompagné de mesures essentielles pour le progrès social en agriculture. Par exemple, la mise en place du statut de conjoint collaborateur a permis aux femmes d’exploitants – très majoritairement visées – d’acquérir une place véritable sur l’exploitation au-delà du statut domestique d’épouse. Leur travail était enfin reconnu.
Après cinq années d’attentisme, où les agriculteurs n’ont obtenu que la mensualisation des retraites et finalement une tardive augmentation minime dans la loi de finances pour 2007, il reste beaucoup à faire pour rattraper un retard qui s’est de nouveau accentué.
En particulier, l’article 5 de la loi du 4 mars 2002 dispose que le Conseil supérieur des prestations sociales agricoles est chargé de faire des propositions sur son extension aux conjoints et aides familiaux. Ces deux catégories essentielles de personnels non-salariés agricoles, sur lesquelles a reposé une grande part de la capacité de notre agriculture à se développer durant la seconde moitié du xxe siècle, n’ont pas été intégrées initialement dans la loi.
Bien que des discussions aient eu lieu quant à cette intégration notamment lors des débats en première lecture de la loi, à la suite de négociations avec les organisations professionnelles agricoles représentatives des non-salariés agricoles, il avait été convenu qu’un certain équilibre économique du dispositif devait être trouvé pour enclencher le mouvement. La volonté de définir une solution partagée a conduit le législateur à limiter, dans un premier temps, le bénéfice de la RCO aux seuls chefs d’exploitation et d’entreprise agricole.
Mais la volonté a été originellement affichée d’étendre ce régime aux autres non-salariés agricoles que sont les conjoints et les aides familiaux, autrement dit les apporteurs de travail familial agricole insuffisamment reconnus.
La reconnaissance des conjoints a certes été améliorée, il convient de prolonger cet effort en leur ouvrant droit à la RCO.
L’extension est de même attendue pour les aides familiaux, qui, s’ils sont de moins en moins nombreux, continuent d’exister. Sous l’appellation d’aide familial, la rédaction de l’article L. 722-10 du code rural englobe les ascendants, les descendants, les frères, sœurs et alliés au même degré du chef d’exploitation ou d’entreprise qui participent à sa mise en valeur comme non-salariés. Un auteur a pu expliquer à juste titre que « leur titre porte la négation même de leur travail : ils ne travaillent pas ils aident (1) ». La contrepartie de cette « aide » est minime, puisque le chef d’exploitation ou d’entreprise est tenu de les nourrir et de les loger, mais non de rémunérer le travail qu’ils fournissent. Ce statut minimal permet néanmoins d’obtenir une protection sociale, puisque l’aide familial bénéficie de l’assurance maladie, invalidité et maternité des personnes non salariées des professions agricoles, et que le chef d’exploitation est tenu de procéder à son immatriculation à l’assurance vieillesse. Reconnaître un le bénéfice de la RCO à ces aides familiaux permettrait au législateur d’accroître la reconnaissance de ces personnes, de leur apport à l’économie agricole.
Ces deux objectifs font l’objet de la présente proposition de loi qui doit trouver application le 1er janvier 2008.
Les articles 1er, 2 et 3 organisent l’extension aux conjoints et aides familiaux du bénéfice du droit à la RCO.
Les articles 4 et 5 organisent le processus de cotisation des aides familiaux. Il apparaît que l’effort de cotisation demandé doit être fourni au moment de la liquidation de la créance de salaire différé définie à l’article L. 321–13 du code rural. Une forfaitarisation est en outre souhaitable, pour simplifier la mise en œuvre.
L’article 6 pose la compétence exclusive de la mutualité sociale agricole pour le recouvrement des cotisations pour les conjoints et aides familiaux qui entrent désormais dans le champ de la RCO (art. L. 732–56, IV du code rural).
L’article 7 étend le champ d’application de la présente proposition de loi aux départements d’outre-mer.
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