Après des années de dérégulation portée par les gouvernements de droite depuis 2002, la crise agricole et la volonté du Président de la République de reconquérir un électorat réputé être le sien, ont été les deux vecteurs à l’origine de ce projet de loi. Présentée comme ambitieuse et répondant à la crise agricole profonde que traverse notre pays, la LMA n’est en fait qu’un pas timide vers la régulation d’un secteur qui en a bien besoin.
La politique de la droite dans le domaine agricole ces dernières années était celle d’une libéralisation toujours plus profonde. Que ce soit avec la loi d’orientation agricole de 2006 qui avait pour but affiché de faire des exploitations agricoles des entreprises comme les autres, que ce soit avec la loi de modernisation de l’économie de 2008 qui a permis à la grande distribution d’imposer aux exploitants agricoles des prix de moins en moins rémunérateurs, que ce soit avec la remise en question de la recommandation nationale d’évolution du prix du lait, avec le bilan de santé de la PAC adopté sous présidence française de l’Union Européenne qui entérine la disparition des quotas laitier ou encore avec les lois de finances qui proposent chaque année un budget agricole sous dimensionné, les choix politiques de la droite ces dernières années ont largement contribué et entrainé la crise agricole d’aujourd’hui.
Le texte qui nous est proposé aujourd’hui, et dont la première lecture à l’Assemblée Nationale aura lieu la semaine prochaine, n’est pas à la hauteur de la crise que traverse l’agriculture et est le symbole du renoncement de la droite face à un secteur qui ne l’intéresse visiblement plus, mais qui reste le poumon économique de la France rurale et la condition d’existence de la France urbaine. En effet, dans ce texte, aucune proposition concrète sur le développement des circuits courts, sur la qualité des denrées alimentaires ou sur l’éducation alimentaire. La contractualisation, pierre angulaire de ce texte, ne saurait remplacer une politique de régulation agricole au niveau national et européen. De plus, en refusant la notion de prix plancher couvrant au moins les coûts de production, le gouvernement ne règle absolument pas la question de la rémunération des agriculteurs. Le troisième titre de ce texte propose d’inscrire l’agriculture dans un développement durable des territoires, ambition dont on peut douter quand Nicolas Sarkozy déclare lors du salon de l’agriculture « l’environnement, ça commence à bien faire », marquant ainsi sa préférence pour une agriculture productiviste à outrance.
Le projet du gouvernement est donc, malheureusement, un texte d’affichage qui ne résout absolument pas la crise structurelle de l’agriculture française. La France et l’Europe doivent se doter d’une nouvelle ambition pour leur agriculture car les enjeux agricoles vont devenir primordiaux au cours du 21e siècle avec l’augmentation de la population mondiale, la raréfaction des terres agricoles et le renchérissement des couts du transport. Cette ambition devrait être de demander un régime particulier pour l’agriculture dans le cadre de l’OMC afin que celle-ci ne serve plus de variable d’ajustement des échanges mondiaux et de promouvoir une relocalisation de l’agriculture afin que chaque peuple puisse assurer l’alimentation de sa population. Nous devrions également à l’échelle de l’Europe promouvoir pour 2013 la mise en place d’une PAC qui assure une agriculture diversifiée et de proximité, ainsi que la mise en place du juste échange avec l’instauration de dispositifs permettant d’examiner le contenu social et environnemental des produits agricoles importés. Enfin, au niveau national, il faut favoriser le développement des conventions de filière, les démarches coopératives, la préservation du foncier agricole, privilégier la qualité et le développement d’une agriculture durable. L’agriculture aujourd’hui est victime des politiques de libéralisation qui ont fait la preuve de leur échec. Il faut donc revenir à plus de régulation dans ce secteur. C’est le sens des 25 propositions socialistes pour une révolution agricole et alimentaire adoptées le 14 juin dernier lors du premier forum des idées sur le thème de l’agriculture.
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