Louis Gallois a remis ce lundi au Premier ministre son rapport sur la compétitivité. Le Premier ministre avait, le 11 juillet, confié à M. Gallois, nouveau Commissaire général à l’investissement, la mission d’établir un diagnostic et de formuler des propositions pour le redressement de la compétitivité de l’industrie française.
Conformément aux engagements pris, M. Gallois a présenté son rapport l'après-midi même aux membres de la Conférence nationale de l’industrie, qui rassemble l’ensemble des partenaires sociaux. M. Gallois avait noué le dialogue avec les partenaires sociaux à l’occasion de la table-ronde « Redressement productif », lors de la Grande Conférence sociale en juillet.
Sur le fond, le rapport dresse un état des lieux extrêmement préoccupant de la situation de l’industrie et de l’économie françaises : « La compétitivité de l’industrie française régresse depuis 10 ans », signe « d’une perte de compétitivité globale de l’économie française ». Louis Gallois évoque un « décrochage », qu’il illustre par quelques chiffres choc :
- Déclin de la part de l’industrie dans la valeur ajoutée (de 18% en 2000 à 12,5% en 2011), situant désormais la France derrière l’Allemagne, mais aussi l’Italie, avec à la clef un fort recul de l’emploi industriel ;
- Chute de nos parts de marché : en Europe, la part de marché des exportations françaises a chuté de 12,7% en 2000 à 9,3% en 2011, pendant que celle des exportations allemandes évoluaient en sens inverse ;
- Dégradation de notre balance commerciale : la balance hors énergie est passée de +25 Md€ en 2002 à – 25 Md€ en 2011.
Cette perte de compétitivité n’est pas seulement un enjeu pour nos entreprises, c’est un défi majeur pour l’ensemble du pays. Louis Gallois souligne qu’elle est pour une large part à l’origine des déséquilibres des finances publiques, comme du chômage, et menace à la fois notre niveau de vie et notre protection sociale. Le gouvernement partage le constat que dresse M. Gallois. Ce bilan est accablant pour les gouvernements qui se sont succédé au cours des dix dernières années, et dont les anciens membres prétendent aujourd’hui nous donner des leçons. C’est la droite qui aurait eu intérêt à ce que le rapport Gallois soit enterré !
Les propositions de M. Gallois portent sur l’ensemble des leviers de la compétitivité. Il souligne à juste titre que le déclin de la performance de l’industrie française résulte en effet de ce qu’il appelle un « cercle vicieux prix / hors prix » : du fait de son positionnement en milieu de gamme en matière de qualité et d’innovation, l’industrie française est exposée à la concurrence par les prix. Face à la concurrence des émergents, mais aussi et surtout de l’Allemagne, elle a dû rogner ses marges pour préserver sa compétitivité-prix, ce qui s’est fait au détriment de sa compétitivité hors-prix. Avec pour conséquence une dégradation de l’autofinancement, une insuffisance d’investissement de productivité, d’innovation, etc. Les difficultés d’entreprises françaises aussi emblématiques que PSA illustrent ce phénomène.
D’où l’importance d’agir sur l’ensemble des leviers – le coût des facteurs de production, comme tous les éléments qui concourent à la compétitivité hors coût : la recherche, la formation, les financements, le renforcement de la cohésion des filières et de la qualité du dialogue social, la qualité des normes et de la régulation… M. Gallois formule plus de 20 propositions. Il appelle aussi à un « choc de confiance », prenant la forme d’un allègement des charges sociales, permettant de donner aux entreprises un ballon d’oxygène de 20 Md€[1] pour relancer l’investissement et de décharger le travail dans l’entreprise d’une partie du poids du financement de la sécurité sociale. M. Gallois ne détaille pas précisément le financement de cette mesure, qui, selon lui, devrait faire appel à la CSG, à la TVA et à la fiscalité écologique.
Le rapport de M. Gallois, ancien haut fonctionnaire, ancien président de la SNCF et d’EADS, homme de dialogue et de conviction, est une contribution majeure à la réflexion sur le redressement de la performance de l’économie française.
Cette réflexion a été engagée par le gouvernement dès sa prise de fonction. Elle s’est traduite par une mobilisation de l’ensemble des ministres, et a donné lieu, au cours de dernières semaines, à trois réunions de travail de ministres à Matignon. Elle a donné lieu à de multiples consultations des acteurs concernés, dont les représentants des organisations syndicales et patronales, par les ministères concernés ainsi que par le Premier ministre lui-même.
Il appartient désormais au gouvernement d’arrêter ses décisions, conformément aux orientations du président de la République. C’est l’objet du séminaire gouvernemental que le Premier ministre réunira demain matin.
[1] La baisse de 30 Md€ des cotisations sociales que propose L. Gallois porte à hauteur de 20 Md€ sur les cotisations patronales, et à hauteur de 10 Md€ sur les cotisations salariales, afin de compenser partiellement la hausse de CSG.
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