A lire dans Libération, une tribune sur trois conditions de réussite du pacte de responsabilité.
Dans les tempêtes économiques que traverse l’Europe, nul ne saurait trouver une issue heureuse en solitaire. La France subit de longue date un chômage de masse, une capacité industrielle amoindrie, et une compétitivité battue en brèche dans de nombreux secteurs. Nombre d’entreprises investissent peu, et se préoccupent du court terme. La rente supplante l’innovation. La panne du dialogue social pendant une décennie a miné la cohésion nationale. Les déficits et la dette ont affaibli la puissance publique et ses capacités d’action. Le retour à un meilleur investissement, privé comme public, figure au premier rang des urgences. La France doit dépenser mieux pour investir plus, créer plus de valeur et retrouver le sens de la justice.
Dans ce moment précis, les entreprises ne se sauveront pas sans leurs salariés, les salariés ne seront pas en sécurité sans la prospérité retrouvée de leurs entreprises. Notre société n’est pas viable sans entreprises innovantes et sans un mouvement social fort. La modernisation du pays est le préalable pour lui rendre son rang, avec un modèle efficace, juste et écologique. Notre obsession : faire baisser le chômage qui ruine le lien social.
Le redressement de la France exige un nouveau compromis. Le gouvernement s’y est attelé dès l’été 2012, en relançant le dialogue social : il a été impulsé par deux grandes conférences sociales, des consultations systématiques, et des accords structurants. Le levier fiscal a aussi commencé à être actionné, en rapprochant fiscalité du travail et du capital. Un pacte de compétitivité a été engagé, avec une ambition industrielle pour la France et pour venir en aide aux entreprises dont la capacité à investir s’effritait. Le Parlement en évaluera sans tarder les résultats, dès 2014.
La réforme des retraites comme celle du marché du travail illustrent également cette volonté d’avancées pour les salariés - à commencer par la prise en compte de la pénibilité et la sécurisation de leurs parcours professionnels -, et en même temps que de nouvelles facilités de développement des entreprises. Un accord sur la formation professionnelle conclut ce premier round du dialogue social. La crise ne condamne pas l’idée de progrès social. La démocratie sociale à la française démontre qu’elle se remet en marche après dix ans de panne sèche.
C’est ce nouveau compromis dont le président de la République, le 31 décembre, a précisé l’esprit. Nous devons sans retard débattre des options gagnantes, sans cacher aux Français les écueils possibles. Ni bluff ni pari, il s’agit d’un grand chantier public, qui doit associer l’ensemble des forces sociales et le Parlement, en pleine lumière. La première condition de réussite sera la transparence de ce débat.
La seconde condition de l’efficacité des choix à venir réside dans les termes de l’échange proposé au pays, et la nature des contreparties à négocier. Ce contrat sera évalué à son efficacité immédiate par des engagements en matière d’emploi qui devront être précis et massifs, sauf à miner la crédibilité de cette politique.
Il sera jugé aux investissements durables dans la compétitivité, la performance sociale - formation, complémentaire santé… -, la mutation écologique, mais aussi au partage des richesses mesuré à l’aune des salaires, des bénéfices réinvestis ou des prélèvements. Ces engagements devront être négociés dans les branches professionnelles et les entreprises, et consignés dans des accords collectifs. L’impact en sera apprécié aussi dans les protections offertes aux milliers de PME aujourd’hui dans la totale dépendance de groupes puissants.
La troisième condition de succès se bâtira par la réforme fiscale, dont le Premier ministre a esquissé les principes en décembre. Nous sommes attachés à ne pas modifier l’équilibre dans cette législature entre la fiscalité des ménages, et celles des entreprises. De même, un effort de justice par la progressivité du prélèvement fiscal et social reste à conquérir d’ici à 2017.
La culture du compromis n’est pas une ligne de clivage au sein des socialistes, sauf à les opposer faussement. Nos débats doivent contribuer à dégager les conditions de l’efficacité réelle de ce nouveau compromis. Parce que nous répondrons de ses résultats devant les Français, nous devons être garants des conditions de son application.
Jean-Christophe CAMBADELIS Député socialiste, Christian PAUL Député PS de la Nièvre, Claude ROIRON, Laurence ROSSIGNOL secrétaire national du Parti socialiste. et Jean-Marc GERMAIN Parlementaires et dirigeants du PS
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