J'ai eu l'occasion d'intervenir au nom de mon groupe lors de l'examen du projet de loi constitutionnelle en commission le 13 avril. Vous trouverez ci-après mon intervention et le compte rendu de la commission peut etre consulté en cliquant sur ce lien.
M. Olivier Dussopt. Voilà un texte bien différent de ce qui était annoncé depuis des mois. Alors qu’il devait graver dans le marbre de la Constitution la « règle d’or » budgétaire souhaitée par certains de nos collègues, on se contente de nous proposer des lois-cadres pluriannuelles, un monopole des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale en matière de prélèvements obligatoires – légitimement dénoncé par le rapporteur –, ou la transmission au Parlement du programme de stabilité.
Les dispositions proposées sont, tout d’abord, largement inutiles. Il n’est pas nécessaire de modifier la Constitution pour assurer le rétablissement des comptes publics : celui-ci est avant tout une affaire de volonté politique. Il y a une certaine hypocrisie à proposer un texte prétendument rigoureux, quand, dans la pratique, on est incapable d’assurer le respect des règles qui existent déjà, tel le critère européen des 3 % du PIB, et quand on s’empresse de prévoir que les lois-cadres seront révisables chaque année. Ce n’est pas en votant un texte, aussi dur soit-il, que la majorité parviendra à dissimuler son inefficacité dans la gestion des comptes publics : en dépit d’une croissance supérieure à 2 % par an entre 2004 et 2007 et de taux d’intérêt faibles, elle n’a pas réussi à contenir l’endettement ; bien au contraire, puisque la dette est passée de 58,8 % du PIB à plus de 80 % aujourd’hui, soit une augmentation de plus de 70 % ! On nous opposera la crise, mais selon la Cour des comptes, seulement un tiers du déficit public annuel lui est imputable, les deux tiers restants étant dus aux mesures, notamment fiscales, prises par la majorité. Je vous renvoie également au rapport de l’OCDE, selon lequel la France pourrait gagner des recettes fiscales sans pénaliser la croissance ; mais les mesures prises dans les quatre dernières années, jusqu’à celles annoncées ce matin dans le domaine de la fiscalité du patrimoine, ne vont pas dans ce sens.
Ce projet contient par ailleurs des dispositions inacceptables. Il est inacceptable de figer les orientations de politique budgétaire et de donner un rang supérieur aux lois ordinaires à des normes comptables ou idéologiques. Lors du référendum constitutionnel de 2005, une partie du texte avait, de même, été regardée comme figeant dans la Constitution des orientations politiques. Il n’est pas davantage acceptable que les collectivités locales soient concernées par ce projet de loi constitutionnelle : c’est contraire au principe de libre administration.
Enfin, ce projet est très hypocrite, jusque dans la méthode. Il nous est présenté comme d’une urgence extrême, alors qu’il ne s’appliquera qu’à compter de 2013. Pour les signataires de ce texte, dont le premier est, à notre grande surprise, le Président de la République, cela revient à repousser la résolution du problème à la prochaine législature et, de plus, à tenter d’imposer des règles au gouvernement suivant, avant même que nos concitoyens se soient exprimés dans le cadre d’un débat démocratique.
Monsieur le rapporteur, c’est la situation financière de notre pays qui a altéré notre crédibilité aux yeux de nos partenaires européens et des organismes financiers ; un texte, aussi symbolique soit-il, ne suffira pas à la restaurer.
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