A la veille du conseil
européen des 18 et 19 octobre à Bruxelles, le président François Hollande a
répondu, à l'Elysée, aux questions des six journaux, dont Le Monde, qui
réalisent conjointement le supplément Europa.
L'Union européenne a été récompensée par le
prix Nobel de la paix à la veille d'un nouveau conseil européen, auquel vous
participez, destiné une fois de plus à tenter de sauver l'euro. Ce choix vous
confère à tous une responsabilité supplémentaire. Comment allez-vous sauver
l'Europe ?
L'attribution du prix
Nobel à l'Union européenne est à la fois un hommage pour le passé et un appel
pour l'avenir. L'hommage, il est adressé aux pères fondateurs de l'Europe,
capables d'avoir réussi la paix au lendemain d'un carnage. L'appel, il est
lancé aux gouvernants de l'Europe d'aujourd'hui, pour qu'ils soient conscients
qu'un sursaut est impérieux.
Sur la sortie de la
crise de la zone euro, nous en sommes près, tout près. Parce que nous avons
pris les bonnes décisions au sommet des 28 et 29 juin et que nous avons le
devoir de les appliquer, rapidement. D'abord, en réglant définitivement la
situation de la Grèce, qui a fait tant d'efforts et qui doit être assurée de
rester dans la zone euro. Ensuite, en répondant aux demandes des pays qui ont
fait les réformes attendues et qui doivent pouvoir se financer à des taux
raisonnables. Enfin, en mettant en place l'union bancaire.
Je veux que toutes ces
questions soient réglées d'ici la fin de l'année. Nous pourrons alors engager
le changement de nos modes de décision, et l'approfondissement de notre union.
Ce sera le grand chantier au début de l'année 2013.
Ces pays qui ont fait des efforts, précisément,
avec des sacrifices lourds pour la population, ne voient pas d'amélioration.
Combien de temps pensez-vous qu'ils pourront tenir sans changement de stratégie
pour relancer la croissance ?
J'ai voulu, depuis mon
élection, que l'Europe se donne comme priorité la croissance sans remettre en
question le sérieux budgétaire, rendu indispensable par la crise des dettes
souveraines. Si nous ne donnons pas un nouveau souffle à l'économie européenne,
les mesures de discipline ne pourront trouver de traduction effective.
Le retour de la
croissance suppose de mobiliser des financements à l'échelle de l'Europe, c'est
le pacte que nous avons adopté en juin, mais aussi d'améliorer notre
compétitivité, et enfin de coordonner nos politiques économiques. Les pays qui
sont en excédent doivent stimuler leur demande intérieure par une augmentation
des salaires et une baisse des prélèvements, c'est la meilleure expression de
leur solidarité. On ne peut pas infliger une peine à perpétuité à des nations
qui ont déjà fait des sacrifices considérables, si les peuples ne constatent
pas, à un moment, les résultats de leurs efforts. Aujourd'hui, ce qui nous
menace, c'est autant la récession que les déficits !
Comment comptez-vous surmonter le clivage qui
subsiste entre les partisans de l'austérité et ceux de la croissance ?
Il appartient à la
France, parce que c'est un grand pays de l'Union européenne, de porter ce
compromis entre le désendettement et la croissance afin de changer la perspective.
Comment ramener la croissance ?
Il y a deux leviers.
Le premier, c'est la confiance. Plus tôt nous sortirons de la crise de la zone
euro, c'est-à-dire plus rapidement nous réglerons le cas grec, et plus vite
nous parviendrons à financer à des taux raisonnables les dettes des pays bien
gérés, plus vite les investisseurs reviendront vers la zone euro. Nous avons
tous les moyens pour agir — Mécanisme européen de stabilité (MES), règles
d'intervention de la Banque centrale européenne (BCE). Alors, utilisons-les.
Le second levier,
c'est de mettre en cohérence la politique économique européenne. Nous avons
défini un pacte de croissance. Mettons-le en œuvre. Cent vingt milliards
d'euros, certains diront : c'est trop peu. Mais ce qui compte, c'est que ces
sommes soient dépensées vite et bien. Le budget européen est aussi un élément
de stimulation de l'économie, notamment à travers les fonds structurels. Nous
pouvons aller plus loin, en mobilisant des ressources supplémentaires. La taxe
sur les transactions financières va faire l'objet d'une coopération renforcée.
Onze pays ont donné leur accord. Son produit pourrait être pour une part
affecté à des projets d'investissement et pour une autre à un fonds de
formation pour les jeunes. C'est le rôle de la France que de dire
inlassablement à nos partenaires que l'austérité n'est pas une fatalité.
Pour remotiver les citoyens européens, pour
"réenchanter l'Europe", quelle idée de l'Europe voulez-vous soutenir
? Une Europe fédérale ? Une Europe des nations ?
Le débat ne se pose
plus comme au début des années 1960, autour du débat entre l'Europe des patries
ou l'Europe fédérale... Il y avait six pays à cette époque, puis huit, puis
douze, aujourd'hui nous sommes vingt-sept, bientôt vingt-huit avec la Croatie.
En changeant de dimension, l'Europe a changé de modèle.
Ma démarche, c'est une
Europe qui avance à plusieurs vitesses, avec des cercles différents. On peut
les appeler "avant-garde", "Etats précurseurs", "noyau
dur", peu importe les appellations, c'est l'idée qui compte. Nous avons
une zone euro, elle a un patrimoine, c'est la monnaie unique. Elle appelle une nouvelle
gouvernance. Cette zone euro doit prendre une dimension politique. Je suis
favorable à ce que l'Eurogroupe, qui rassemble les ministres des finances, soit
renforcé et que le président de l'Eurogroupe ait un mandat clair et
suffisamment long.
Je suis également
partisan d'une réunion mensuelle des chefs d'Etat et de gouvernement de cette
zone. Finissons-en avec ces sommets soi-disant de la dernière chance, ces
réunions historiques, ces rendez-vous exceptionnels... et qui n'ont débouché
que sur des succès éphémères. Les marchés, c'est tous les jours, les arbitrages
des entreprises, c'est dans l'instant ! L'Europe ne peut plus être en retard.
Le Conseil de la zone
euro permettra de mieux coordonner la politique économique et de prendre, pays
par pays, les décisions appropriées. Il ne s'agit pas d'exclure les autres pays
: ceux qui veulent rejoindre la zone euro seront associés à nos débats.
Certains pays ne le veulent pas – c'est leur choix. Mais pourquoi faudrait-il
qu'ils viennent nous dire comment doit être dirigée la zone euro ? C'est une
prétention que j'entends, mais qui ne me paraît pas répondre à l'obligation de
cohérence.
Alors, ensuite, il y a
cette Europe des Vingt-Sept/Vingt-Huit bientôt et demain davantage. C'est un
espace politique de solidarité, un grand marché, une volonté de convergence
économique, sociale, culturelle. Je voudrais lui donner une nouvelle dimension
pour la jeunesse, l'université, la recherche, l'énergie. Mais cette Union large
ne doit pas empêcher des coopérations renforcées, celles que des Etats
voudraient engager à quelques-uns et qui dégageraient des moyens au-delà du
budget européen. Ce sera le cas avec la taxe sur les transactions financières.
Certains voudraient créer un embryon de
Parlement séparé de la zone euro. L'Union européenne ne risque-t-elle pas de se
réduire aux pays de la zone euro, une Europe à deux vitesses ?
Que l'Europe ait
plusieurs vitesses, c'est déjà le cas. Mais le Parlement européen a vocation à
représenter toute l'Europe, et si la zone euro se structure davantage, il est
parfaitement capable de définir en son sein des procédures démocratiques
dédiées à la zone euro.
Pour une Europe plus intégrée avec l'union
politique, ne faut-il pas un nouveau traité constitutionnel, soumis à
référendum ?
Je crois me souvenir
qu'en 2005 nous avons essayé cette formule et qu'elle n'a pas donné les
résultats escomptés ! Parce qu'avant de se lancer dans une mécanique
institutionnelle, les Européens doivent savoir ce qu'ils veulent faire
ensemble. C'est le contenu qui doit l'emporter sur le cadre. L'enjeu
institutionnel est souvent évoqué pour ne pas faire de choix. Les plus
empressés à parler de l'union politique sont parfois les plus réticents à
prendre les décisions urgentes qui la rendraient pourtant incontournable, ça ne
m'a pas échappé....
Les Allemands ?
Non, je ne vise
personne en particulier. Plusieurs fois, dans le passé, les Allemands ont fait
sincèrement des propositions sur l'union politique. Elles n'ont pas été
saisies. Aujourd'hui, nous sommes en phase. La France défend
l'"intégration solidaire" : chaque fois que nous franchissons un pas
vers la solidarité, l'union, c'est-à-dire le respect des règles communes autour
d'une gouvernance, doit progresser.
Ainsi, l'union
bancaire qui conduit à une supervision, dont la Banque centrale européenne sera
l'organe, et qui permettra une résolution des crises, avec une recapitalisation
des banques, c'est une compétence très importante. Cette solidarité ne pourra
aller sans contrôle démocratique : l'union bancaire qui vise à maîtriser la
finance sera une étape importante de l'intégration européenne.
Quelle est la capacité réelle de la France de
convaincre l'Allemagne et les pays réticents d'avancer sur cette voie ?
Nous avons pris des
décisions ensemble au conseil européen de juin. Elles ont eu incontestablement
des conséquences favorables : le calme est revenu sur les marchés. La BCE y a
contribué en clarifiant ses modes d'intervention. Donc, ma position est simple
: tout le conseil européen du 28 juin, rien que le Conseil européen du 28 juin,
mais appliqué le plus vite possible. L'objectif, c'est de tout régler d'ici à
la fin de l'année. Plus personne aujourd'hui ne pense que l'euro va disparaître
ou que la zone va éclater. Mais la perspective de son intégrité ne suffit pas.
Maintenant, nous devons sortir de la crise économique.
Donc l'union politique, ce n'est pas pour
maintenant ?
L'union politique,
c'est après, c'est l'étape qui suivra l'union budgétaire, l'union bancaire,
l'union sociale. Elle viendra donner un cadre démocratique à ce que nous aurons
réussi de l'intégration solidaire.
A quelle échéance la voyez-vous, cette union
politique ?
Après les élections
européennes de 2014. L'enjeu de cette consultation, ce sera l'avenir de
l'Union. C'est la condition pour mobiliser les peuples et augmenter les taux de
participation autour d'un vrai débat. J'espère que des partis européens
présenteront leurs propositions aussi bien en termes de contenu, de cadre
institutionnel que de personnalités, pour les porter notamment à la présidence
de la Commission européenne.
Beaucoup de voix s'élèvent contre l'objectif du
déficit ramené à 3 % du produit intérieur brut (PIB). Claude Bartolone,
président (PS) de l'Assemblée nationale, le qualifie même
d'"absurde". Un accord européen est-il possible pour le repousser
d'un an ?
Tous les pays ne sont
pas dans la même situation. Et beaucoup dépendra de nos choix en matière de
respect des disciplines budgétaires et de croissance. Cette discussion aura
lieu en 2013. Mais pour ce qui concerne la France, j'ai fixé l'objectif de
réduction de déficit à 3 % pour 2013 et de rétablissement de l'équilibre des
comptes publics en 2017. Pour une raison simple et qui ne se résume pas à un
engagement européen : de 2007 à 2012, la dette publique est passée en France de
62 % du PIB à 90 %. Prolonger cette tendance ne serait pas soutenable.
L'objectif, il est
aussi, à l'échelle de l'Europe, d'harmoniser les taux d'intérêt dans la zone
euro. Politique monétaire et politique budgétaire doivent se conjuguer. Et il
ne peut être admis, dans un même espace monétaire que des pays se financent à 1
% à dix ans et d'autres à 7 % ! Il faut éviter un effet de rente.
Votre élection a créé des attentes énormes. Que
diriez-vous à un Grec au chômage, sans argent pour se soigner ?
Que je ferai tout pour
que la Grèce demeure dans la zone euro et dispose des ressources indispensables
d'ici à la fin de l'année, sans qu'il soit nécessaire d'infliger de nouvelles
conditions autres que celles qui ont été admises par le gouvernement Samaras.
Mais je m'adresse
aussi aux Espagnols et aux Portugais qui payent cher les dérèglements commis
par d'autres : le temps est venu d'offrir une perspective au-delà de
l'austérité. L'Espagne doit pouvoir connaître les conditions précises pour
accéder aux financements prévus par le conseil européen du 28 juin. Et il n'y a
pas lieu d'alourdir la barque.
La France est le trait
d'union entre l'Europe du Nord et celle du Sud. Je refuse la division. Si
l'Europe s'est réunifiée, ce n'est pas pour tomber ensuite dans l'égoïsme ou le
chacun pour soi. Notre devoir, c'est de poser des règles communes autour des
principes de responsabilité et de solidarité. Comme Français, ma
responsabilité, c'est de faire en sorte que les Européens soient conscients
d'appartenir au même ensemble.
C'est ce que vous dites à la chancelière
allemande, Angela Merkel, aussi ?
Oui, mais elle le sait
parfaitement. La preuve, c'est qu'elle est allée à Athènes.
Etes-vous inquiet de la résistance croissante,
en Allemagne, à la solidarité avec les pays du Sud ?
Mais nous participons
tous à la solidarité, pas seulement les Allemands ! Les Français, les Allemands
comme tous les Européens dans le cadre du Mécanisme européen de stabilité
[MES].
Cessons de penser
qu'il n'y aurait qu'un seul pays qui paierait pour tous les autres. C'est faux
! En revanche, je sais la sensibilité de nos amis allemands au problème de la
surveillance. Qui paie doit contrôler, qui paie doit sanctionner. Je suis
d'accord. Mais l'union budgétaire doit être parachevée par une mutualisation
partielle des dettes : à travers les eurobonds.
Je sais aussi combien
pèsent les souvenirs de l'hyperinflation, transmis de génération en génération
en Allemagne. Les modalités d'intervention de la BCE évitent tout risque de
cette nature, puisque la Banque centrale vient en appui des décisions prises au
sein du MES. Or, qu'est-ce que le MES, si ce n'est un ensemble d'Etats ? Donc,
la BCE ne créera pas de monnaie lorsqu'elle viendra en soutien des pays
débiteurs. Elle rendra plus efficace la politique monétaire.
J'ai également
considéré les arguments démocratiques avancés outre-Rhin. J'admets parfaitement
que les parlements doivent pouvoir autoriser les engagements demandés aux
Etats, aussi bien dans le cadre de l'union budgétaire que de l'union bancaire.
Mais il n'y a pas de temps à perdre. La France y est prête.
Dans cette Europe à plusieurs vitesses, quelle
place occupera l'axe Paris-Berlin ? Est-ce le premier cercle ?
C'est le couple qui
permet l'accélération. Et qui, donc, peut aussi être un frein s'il n'est pas en
phase. D'où la nécessité de la cohérence franco-allemande. Nous avons un devoir
d'union ; il exige un sens élevé de l'intérêt européen et, donc, du compromis.
Est-ce que ce doit
être une relation exclusive ? Non ! L'Europe ne se décide pas à deux. L'amitié
franco-allemande doit agréger, associer, assembler. Je prends garde de ne pas
opposer grands et petits pays, pays fondateurs et pays nouvellement adhérents.
L'Europe a besoin de tous, elle ne se résume pas à de l'intergouvernemental.
Les institutions communautaires : Commission et Parlement doivent jouer
pleinement leur rôle.
Elle appelle également
une ambition. C'est la vision qui est confiée historiquement à la France et à
l'Allemagne. Si nous avons été capables de nous unir, nous, c'est que nous
pouvons réussir à le faire tous ! C'est ce que nous rappellerons lors des
cérémonies pour le 50e anniversaire du traité de l'Elysée.
Dans votre relation personnelle avec Mme
Merkel, qu'est-ce-que vous avez appris d'elle ?
Elle est claire, elle
dit les choses... Cela fait gagner du temps. Et j'ai la même démarche. Alors,
ensuite, de nos points de départ, nous cherchons à trouver le meilleur point
d'arrivée. C'est plus facile avec des points de départ explicites qu'avec des
points de départ ambigus. Et on ne peut pas reprocher à Angela Merkel d'être
ambiguë ! Certes, nous ne sommes pas dans la même échelle de temps : je suis
élu depuis cinq mois, et la chancelière a ses élections dans dix mois, mais ça
ne nous conduit pas à différer les choix.
Et vous, que lui apportez-vous ?
Posez-lui la question
! Je pense qu'elle est consciente que l'alternance en France a créé une
nouvelle donne. Elle est très sensible aux questions de politique intérieure et
aux exigences de son Parlement. Je le comprends : nous le sommes tous. Nous
avons tous notre opinion publique, nos débats démocratiques. Mais notre
responsabilité commune, c'est de faire prévaloir l'intérêt de l'Europe.
On vous présume européen...
Vous faites bien !...
... mais pendant la campagne, vous n'avez parlé
que du "rêve français", jamais du "rêve européen". Quel est
votre attachement personnel à l'Europe ?
L'idéal européen, il
est dans le rêve français. Les révolutionnaires de 1789 avaient imaginé une
nation ouverte à tous les Européens. Victor Hugo fut le premier à parler des
Etats-Unis d'Europe. Après la boucherie de 14-18, Aristide Briand plaidait déjà
pour l'Europe au nom de la paix. A la Libération, pour Jean Monnet comme pour
Charles de Gaulle, construire l'Europe, c'était reconstruire la France.
François Mitterrand a conçu sa présidence au nom de l'Europe.
Je m'inscris dans
cette perspective. Ce que je veux pour mon pays, c'est qu'il retrouve la fierté
et la force de renouveler la promesse républicaine à la jeunesse. Pourquoi
suis-je européen ? Parce que l'Europe nous permet d'y parvenir. Et s'il se
produit une fracture entre l'Europe et la patrie, alors le risque est de perdre
à la fois la cohésion nationale et l'idéal européen.
C'est ce qui s'est passé en 2005, avec le non
au référendum sur le traité constitutionnel ?
C'était un
avertissement sérieux. Il n'a pas été entendu. L'enjeu, aujourd'hui, c'est de
retrouver la confiance en nous même et en l'Europe. Ce qui nous menace, ce
n'est pas la nation, c'est le nationalisme. Ce n'est pas l'Europe, c'est son
absence.
Prendriez-vous le risque de voir la
Grande-Bretagne quitter l'Europe ?
Je souhaite un
Royaume-Uni pleinement engagé en Europe, mais je ne peux pas décider à la place
des Britanniques. J'ai observé que, pour le moment, ils souhaitaient être
plutôt en retrait. Les Britanniques sont liés par des accords auxquels ils ont
souscrits. Ils ne peuvent s'en détacher. Maintenant, ils ont au moins le mérite
de la clarté. La zone euro, l'union budgétaire : ils n'y sont pas. Je n'entends
pas les forcer.
Quelle est la plus grande menace qui pèse sur
l'Europe ?
C'est de ne plus être
aimée. De n'être regardée au mieux que comme un guichet austère, où les uns
viendraient chercher des fonds structurels, d'autres une politique agricole, un
troisième un chèque, au pire comme une maison de redressement. A elle de donner
du sens à son projet, mais aussi de l'efficacité à ses décisions. Et pourtant,
l'Europe reste la plus belle aventure pour notre continent. Elle est la
première puissance économique du monde, un espace politique de référence, un
modèle social et culturel. Elle mérite un sursaut pour renouer avec
l'espérance.
Le pire est passé ?
Le pire – c'est-à-dire
la crainte d'un éclatement de la zone euro –, oui, il est passé. Mais le
meilleur n'est pas encore là. A nous de le construire.
Propos recueillis par
Sylvie Kauffmann (Le Monde), Angelique Chrisafis (The Guardian), Berna Gonzalez
Harbour (El Pais), Jaroslaw Kurski (Gazeta Wyborcza), Alberto Mattioli (La
Stampa) et Stefan Ulrich (Süddeutsche Zeitung)
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