Après la condamnation de la crèche BabyLoup, il n'est pas du rôle des élus de commenter une décision de la Cour de Cassation et en encore moins de la dénoncer. Cette juridiction a appliqué le droit et si la décision nous parait aller dans un sens contraire aux valeurs de la République telles que nous les entendons, c'est à une modification du droit qu'il faut appeler et non à une condamnation de la Justice. C'est dans cet esprit que j'ai signé l'appel à une nouvelle loi sur les signes religieux publié par Marianne le 23 mars dernier. Des intellectuels ont aussi signé comme Elisabeth Badinter, Henry Pena-Ruiz ou Caroline Fourest.
Depuis, de nombreux signataires nous ont réjoints dont le 1er Secrétaire du Parti Socialiste et nombre de parlementaires.
Il ne s'agit surtout pas de s'opposer à une religion plutot qu'une autre, ce serait injuste et mortifère. Il s'agit simplement de clarifier la notion même de laïcité et de mieux définir la question de l'influence et de la place des signes religieux et des cultes dans l'espace public. C'est d'ailleurs ce qu'a dit le Président de la République, sur France2, le 28 mars 2013.
L'appel à une nouvelle loi sur les signes religieux
Le moment est grave, nous sommes dans une heure de vérité où la laïcité en France doit absolument être consolidée et réaffirmée, faute de quoi elle subira un recul dramatique.
Rappelons les faits. En conformité avec son règlement intérieur établi sur le principe de "neutralité philosophique, politique et confessionnelle", la crèche Baby Loup de Chanteloup les Vignes a licencié en 2008 l'une de ses employées, au motif qu'elle manifestait ostensiblement son appartenance religieuse par le port d'un voile dit islamique. Le Conseil des prudhommes de Mantes la Jolie en 2010, et la Cour d'appel de Versailles en 2011 ont approuvé ce licenciement.
En ce 19 mars 2013, la Cour de cassation a invalidé ces jugements et lui nie ce droit en affirmant que " (...) s'agissant d'une crèche privée, (elle) ne peut dès lors, en dépit de sa mission d'intérêt général, être considérée comme une personne privée gérant un service public " à laquelle le principe de laïcité devrait s'appliquer.
Il ne nous appartient pas comme à tout citoyen respectueux de l'Etat de droit, de commenter l'arrêt de la Cour, mais nous constatons qu'une crèche qui accomplit depuis 22 ans un travail de terrain extraordinaire, seule en France ouverte 24h sur 24 et 7 jours sur 7, ne peut appliquer la laïcité dans son règlement intérieur pour faire vivre en harmonie enfants et parents de 54 nationalités qui se côtoient entre ses murs. Cela, notre droit le lui interdit aujourd'hui.
Dans un État laïque, il serait ainsi permis de créer une crèche privée religieuse, mais pas une crèche laïque ? Impérative pour la puissance publique, la laïcité serait interdite aux citoyens et aux structures privées ? Parce qu'ils sont précisément d'entre nous tous, les êtres les moins pourvus de défense et les plus malléables, les enfants ont droit à la neutralité, garante de leur libre arbitre en formation.
Notre loi doit impérativement être modifiée. Il n'est pas acceptable qu'un organisme dont l'utilité publique n'est plus à démontrer et dont les personnels ont manifesté un dévouement exemplaire à l'intérêt général, soit contraint de céder à des exigences personnelles. Il est inadmissible que ces professionnels soient mis dans l'impossibilité d'exercer une mission de service public dans le respect de la laïcité.
C’est au législateur qu’il revient de remédier à cet état de confusion et de combler ce vide juridique qui, menaçant gravement l'application de la laïcité, principe constitutionnel de notre République, met en péril le vivre ensemble.
Les premiers signataires :
Jeannette Bougrab, ancienne ministre;
Elisabeth de Fontenay, philosophe;
Alain Finkielkraut, philosophe;
Caroline Fourest, essayiste;
Sihem Habchi, ancienne présidente de NPNS;
Nadia El Fani, cinéaste;
Malika Sorel, essayiste;
Catherine Kintzler, philosophe;
Françoise Laborde, sénatrice de Haute-Garonne;
Michèle Vianès, présidente de Regards de femmes;
Jacques Toubon, ancien ministre;
Jean Glavany, ancien ministre, député des Hautes-Pyrénées;
Jean-Michel Baylet, ancien ministre, président du Parti radical de gauche, sénateur du Tarn-et-Garonne;
Roger-Gérard Schwartzenberg, ancien ministre, président du groupe RRDP à lAssemblée nationale, député du Val-de-Marne;
Guy Lengagne, ancien ministre;
Abdennour Bidar, philosophe;
Paul Thibaud, philosophe;
Jean-Pierre Le Goff, philosophe;
Henri Pena-Ruiz, philosophe;
Philippe de Lara, philosophe;
Alain Seksig, inspecteur à lEducation nationale;
José Gulino, grand maître du Grand Orient de France;
Jean-Pierre Blazy, député du Val-dOise;
Abdelwahab Meddeb, écrivain;
José Gulino, Grand Maître du Grand Orient de France ;
Jean-Pierre Blazy, député du Val dOise ;
Jeanine Dubié, députée des Hautes Pyrénées ;
Annick Girardin, députée de Saint Pierre et Miquelon ;
Dominique Orliac, députée du Lot ;
Odile Saugues, députée du Puy de Dôme ;
Fanny Ervera, Conseillère générale des Yvelines ;
Annie Sugier, présidente de la Ligue du droit international des femmes ;
Martine Cerf, secrétaire générale dEgalité Laïcité Europe ;
Jacques Mézard, président du groupe RDSE au Sénat, sénateur du Cantal ;
Christian Bataille, député du Nord ;
Thierry Braillard, député du Rhône ;
Gérard Charasse, député de lAllier ;
Joël Giraud, député des Hautes Alpes ;
Stéphane Saint André, député du Pas de Calais ;
Alain Tourret, député du Calvados ;
Olivier Dussopt, député de lArdèche ;
Philippe Esnol, Sénateur des Yvelines ;
Olivier Falorni, député de Charente Maritime ;
Gérard Delfau, sénateur honoraire ;
Patrick Kessel, président du Comité Laïcité République,
Jacques Samouélian, Président de la Fédération française du Droit Humain ;
Philippe Foussier, Grand Orateur du Grand Orient de France,
Alain Simon, Chargé de la laïcité au Grand Orient de France
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