L’Assemblée nationale a adopté en première lecture le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, ce mardi 14 janvier 2014. Ce texte, qui s’inscrit dans la lignée de la renégociation de la PAC portée par la France en 2013, repose sur une vision globale des enjeux de l’agriculture française et la volonté d’apporter des réponses adaptées aux problèmes auxquels fait face le secteur. Stéphane le Foll, ministre de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, a salué le choix des députés qui « ont donné à l’agriculture française les moyens d’une compétitivité nouvelle ». La loi portera ce renouveau à travers la double performance économique et écologique et repose sur plusieurs grands objectifs.
Créer une dynamique agro-écologique et coopérative
La première ambition de ce projet de loi est de donner aux professionnels de l’agriculture les outils pour développer un modèle agro-écologique et coopératif efficace. Le dispositif-clef en la matière est la création des Groupements d’Intérêt Economique et Environnemental (GIEE) qui pourront bénéficier de majorations des aides agricoles, dans une optique de double performance économique et environnementale. Les GIEE réuniront plusieurs agriculteurs unis par une volonté de développer des systèmes adaptés à leur territoire. La reconnaissance des GIEE se fera au niveau régional, échelle privilégiée du développement économique.
L’émergence de ce nouveau modèle d’entreprenariat agricole ne se fera pas sans moyens puisque le Gouvernement a mis en place un Programme National de Développement Agricole et Rural(PNDAR) et un appel à projet qui a déjà recueilli 469 candidatures de collectifs représentant au total 15 000 agriculteurs. Cette dynamique a incité le ministère à faire passer son enveloppe de subventions de 2,5 M€ à 6,7 M€ à distribuer aux projets agro-écologiques qui seront retenus. Enfin, la loi donne une impulsion forte au développement des stratégies de biocontrôle en agriculture, permettant d’utiliser les ressources et mécanismes naturels pour protéger les végétaux.
Favoriser l’émergence de nouvelles générations d’agriculteurs
Le deuxième objectif du projet de loi est de stopper le vieillissement et le déclin démographique des populations d’agriculteurs : pour cela, le Gouvernement tourne son action vers la jeunesse. D’une part, le texte consacre l’enseignement et la formation aux techniques agricoles, lui apporte une véritable dimension agro-écologique et affirme les objectifs de réussite scolaire, de promotion sociale et d’insertion professionnelle des jeunes agriculteurs. Ainsi sera créée une voie d’accès spécifique aux écoles d’agronomie pour les bacheliers professionnels, permettant de diversifier les publics accédant aux écoles tout en assurant l’excellence des recrutements. La création de l’Institut Agronomique et Vétérinaire de France répondra quant à elle à la nécessité de renforcer le pilotage national de l’enseignement supérieur et de la recherche autour de l’agronomie, l’agroalimentaire, la forêt et les sciences vétérinaires. Cet institut rassemblera tous les établissements d’enseignement supérieur agronomique et vétérinaire publics, les organismes de recherche du secteur et d’autres établissements d’enseignement supérieur.
Par ailleurs, le ministre de l’Agriculture a souhaité faciliter l’accès au foncier en mettant en place une politique publique de l’installation ambitieuse. Un dispositif d’installation progressive est mis en place et le concept de surface minimale d’installation sera remplacé par la Surface minimale d’assujettissement, redéfinie pour y incorporer une notion d’activité. La loi consacre ainsi une meilleure prise en compte de la diversité des productions et modèles d’exploitation.
Enfin, non seulement les SAFER deviennent des opérateurs fonciers des espaces agricoles et naturels avec un rôle conforté notamment par un droit de préemption étendu, mais elles sont désormais régionalisées pour encourager les nouvelles exploitations et consolider les autres tout en limitant l’agrandissement excessif, et en tenant compte de la nécessité du maintien de l’emploi.
Rééquilibrer le marché agro-alimentaire
Dans un contexte de volatilité des prix et de rapport de force déséquilibré entre les producteurs d’une part, les industries transformatrices et les plateformes de distribution d’autre part, les agriculteurs souffrent de la baisse globale de leur marge et de négociations qui tournent en leur défaveur. C’est pour cela qu’en complément de la « loi consommation », le projet de loi renforce l’encadrement de la contractualisation et la protection des jeunes agriculteurs. Le rôle des organisations de producteurs (OP) est renforcé et ces dernières pourront désormais agir collectivement en justice en cas de litige. La loi consacre également l’existence d’un médiateur des relations commerciales agricoles compétent sur l’ensemble de la chaîne agroalimentaire et qui, au-delà du règlement des conflits bilatéraux, pourra avoir un rôle plus structurel d’amélioration des relations au sein des filières.
Bâtir un modèle alimentaire plus sain
Le texte aspire également au renforcement des performances alimentaires et sanitaires du pays. D’une part, le projet de loi systématise la publication des résultats des contrôles effectués dans les établissements alimentaires et améliore la protection des salariés «lanceurs d’alertes», afin de limiter les risques de fraudes alimentaires et préserver la nécessaire relation de confiance qui doit lier les consommateurs et les producteurs du secteur agroalimentaire.
D’autre part, l’usage excessif des produits phytosanitaires représentant un danger pour la santé humaine, la loi met en place un suivi post Autorisation de Mise sur le Marché des produits phytosanitaires afin de mieux mesurer leurs effets, sur la santé humaine notamment. Cette évaluation n’était jusqu’à présent menée qu’au moment de la délivrance ou du renouvellement de l’autorisation de mise sur le marché de ces préparations. Les députés ont par ailleurs acté le transfert de la compétence de la délivrance de l’autorisation de ces substances à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). L’interdiction de la publicité pour les produits phytosanitaires destinés aux amateurs incarne la volonté d’en réduire l’usage. Toujours dans l’idée de développer des pratiques plus responsables écologiquement, le projet de loi prévoit un encadrement plus strict des pratiques commerciales relatives aux médicaments vétérinaires afin d’en limiter l’usage et l’impact sur la santé humaine.
Mettre en valeur le patrimoine forestier français
Enfin, il s’agira de mieux exploiter les 16 millions d’hectares de forêt nationaux (28% du territoire métropolitain) par la création d’un fonds stratégique, afin de financer les investissements et les innovations dans la filière bois et la rénovation du dispositif d’assurance pour la forêt. Par ailleurs, la reconnaissance de l’intérêt général du captage et du stockage de carbone dans le bois incitera à davantage construire de bâtiments en bois.
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