Retrouvez mon interview, comme président de l'APVF, dans Courrier des Maires. Finances locales, intercommunalités, DGF, groupements hospitaliers de territoires. Tout ce qui fait l'actualité des petites villes avant nos assises de fin mai à la Grande Motte.
A 15 jours des assises de l’Association des petites villes de France (APVF), son président, Olivier Dussopt , revient sur les dossiers importants pour ces communes de 2.500 à 25.000 habitants: nouvelle carte intercommunale et accompagnement par l’Etat, réforme de la DGF et dernière tranche de la baisse des dotations. Sans oublier la gouvernance hospitalière locale et la revitalisation des centres-bourgs. Et le maire d’Annonay d’esquisser la position de l'APVF à l'approche de la campagne électorale de la présidentielle.
Cette année, c’est l’association des petites villes (APVF) qui ouvre « le bal » des congrès des différentes associations d’élus, le 26 mai, à la Grande-Motte (Hérault). Et ce, une semaine avant le rendez-vous majeur du Congrès des maires, qui en sera un puissant écho. « Comment se faire entendre ? » s’interroge en 2016 l’APVF à l’heure des grandes régions et futures grandes intercos. Entretien avec son président, le député-maire d’Annonay, Olivier Dussopt.
Le Courrier des maires : Quel jugement portez-vous sur les schémas intercommunaux arrêtés au 31 mars, notamment sur l’intégration, voire l’absorption, des communautés abritant des petites villes ?
Olivier Dussopt: Selon moi, il n’y a pas eu d’absorption. En regardant comment se sont passées les CDCI, le premier bilan fait par nos adhérents est plutôt positif. Les débats ont été sereins. La possibilité de déroger à la loi pour, dans certains cas, rester à 5 000 habitants ou la souplesse introduite pour accéder au statut de communauté d’agglomération ont été plutôt bien utilisées.
Restent quelques départements où sont apparues des crispations : là où les élus estiment ne pas avoir été écoutés et où le préfet pourrait utiliser le « passer-outre ». Et d’autres avec des propositions de schémas comportant des EPCI dits « XXL » allant bien au-delà de ce que la loi souhaitait. J’ai bien conscience que là où une interco XXL est proposée, la difficulté vient parfois du manque d’alternative proposée.
En quoi consiste l’accompagnement, par l’Etat, des nouveaux EPCI, que vous appelez de vos vœux ?
O. Dussopt: La phase qui s’ouvre sera celle de la mise en œuvre des fusions, avec beaucoup d’écueils à franchir, notamment sur l’ingénierie. L’Etat ne doit pas se contenter de fixer des périmètres. Il lui faut mettre à notre disposition des simulations financières et nous accompagner dans les tunnels de convergence fiscale.
Les écueils sont aussi techniques, avec des calendriers de fusions assez brefs, des communautés de communes devenant communautés d’agglomération et des communautés d’agglomération intégrant une communauté de communes. S’ajoutent à cela les problèmes de seuils fiscaux pour les entreprises et du versement transport, des politiques d’abattement, etc.
C’est pourquoi nous demandons de la souplesse dans la mise en oeuvre du calendrier,notamment pour les communautés devenant communautés d’agglomération. Ce qui n’empêche aucunement de fusionner celles qui sont prêtes pour ce faire.
Craignez-vous de voir le pouvoir des petites villes dissous dans ces grandes intercos ?
O. Dussopt: Nous avions fait voter les dérogations pour sous-densité, ce qui permettait déjà d’éviter des intercommunalités trop étendues. Ensuite, le fonctionnement des communautés dépendra non seulement des règles législatives, mais aussi des élus. La loi Fillon de 2010 fixant le nombre de conseillers communautaires a pour conséquence que beaucoup de petites communes n’auront qu’un délégué à l’interco. Nous préconisons donc d’installer une conférence des maires dans chaque EPCI, pour que chaque maire puisse être associé aux décisions.
Espérez-vous un accord sur une réforme de la dotation globale de fonctionnement d’ici l’été ?
O. Dussopt: L’année dernière, tout le monde s’était accordé pour reporter l’application de la réforme à 2017. Mais les simulations de la réforme sont arrivées très tardivement et ont fait apparaître des écarts importants que ne laissaient pas présager les principes de la réforme tels que votés dans le budget 2016.
Aujourd’hui, nous faisons face à la difficulté de définir la centralité et d’appliquer la réforme aux territoires pluricentraux, avec plusieurs centres-bourgs. Les communes de 7 000 à 30 000 habitants dans des communautés de moins de 100 000 habitants apparaissent comme perdantes, notamment celles désindustrialisées. Les différents groupes de travail avancent, mais on est encore beaucoup sur les diagnostics. D’autant qu’il existe un débat sur les parts gelées de la DGF : beaucoup sont des compensations par l’Etat de l’exonération de la part salaire de l’ancienne taxe professionnelle !
La réforme n’est-elle pas bloquée par la défense des intérêts catégoriels de chaque association de collectivités ?
O. Dussopt: Il est logique que les associations représentant des strates de collectivités défendent d’abord les collectivités de leur strate ! Mais j’observe que même au sein de certaines associations généralistes de collectivités, il est tout aussi difficile de trouver un consensus….
A ce stade, quelles sont vos revendications sur cette révision de la réforme ?
O. Dussopt: Nous restons sur la même position : que les charges de centralité soient prises en compte, que la réforme se fasse suivant des mécanismes pluriannuels. Et nous soutenons, bien sûr, le principe que cette réforme ne peut être menée dans un tel contexte de baisse des dotations.
La révision de la baisse des dotations est-elle un préalable à la réforme de la DGF comme le soutient le Sénat ?
O. Dussopt: Il n’était pas illégitime que les collectivités soient associées à la CRFPP. Mais nous avons toujours dit que le montant de 11 milliards d’euros était excessif, et le rythme trop rapide. Nous demandons a minima l’étalement de la baisse, et il serait encore plus heureux qu’elle soit supprimée en 2017. Car nous constatons que même les dépenses de fonctionnement sont atteintes à des niveaux structurels et que la diminution de l’investissement public local s’aggrave. Or, à une période de reprise de l’investissement privé, de l’activité du BTP et de la reprise de certains indicateurs économiques, il serait dommage que la baisse des dotations ait un effet contracyclique sur cette reprise.
Nous alertons l’exécutif : si la diminution est confirmée, nous ne saurons plus faire. Et ce d’autant moins que les dépenses qui nous sont imposées par l’Etat – réforme PPCR, revalorisation du point d’indice, insuffisante compensation de la réforme des rythmes scolaires – demeurent.
Les programmes d’aide financière de l’Etat et de la Caisse des dépôts suffiront-ils à retourner la tendance de désertification de vos centres-bourgs ?
O. Dussopt: J’avais fait en sorte, lors de l’examen de la loi Notre, que la politique locale de soutien aux activités commerciales reste dans le champ de la définition d’un intérêt communautaire pour que cette politique fasse partie intégrante des plans de rénovation de leurs centres-villes, ce qui constitue un moteur puissant. Ensuite, il y a beaucoup de dispositifs : le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD), 25 en France, ceux de l’ANAH, les dispositifs fiscaux, etc.
L’objectif, aujourd’hui, n’est plus d’obtenir de nouveaux financements, mais d’avoir de la visibilité et des critères de sélection des projets. Et nous avons besoin d’aide à l’ingénierie dans la maîtrise du foncier, du « recyclage » de l’immobilier. Toutes les collectivités ne peuvent le faire. Comme les équipes de l’Etat sur place n’en ont plus les moyens, c’est la Caisse des dépôts qui prend le relais et fait un travail exemplaire en la matière. S’ajoute un rôle certain d’assistance territoriale de la part des départements, une compétence inscrite dans la loi Notre.
Où en êtes-vous de votre négociation avec le ministère de la Santé pour être davantage présent dans la gouvernance des groupements hospitaliers de territoire ?
O. Dussopt: Nous avons saisis Marisol Touraine des difficultés de dialogue entre les ARSet les élus des petites villes, dont beaucoup sont des villes hospitalières. Le risque est que nous soyons uniquement consultés via les « comités de suivi », alors que nous faisons face à une concentration excessive de l’offre de soins, au détriment des petits établissements de santé.
La ministre nous a entendus et nous devons à nouveau rencontrer ses équipes en mai pour définir les moyens de mieux assurer l’association des élus à la gouvernance desgroupements hospitaliers de territoires.
Comment l’APVF compte-t-elle peser dans les débats de l’élection présidentielle à un an du scrutin ?
O. Dussopt: Association pluraliste, l’APVF ne donnera aucune consigne de vote. Même si nous mettrons en avant des sujets qui nous tiennent à cœur : les finances locales, l’offre de soins sur le territoire, les services publics locaux, etc. Nous rendrons publiques nos orientations qui traiteront aussi de la place des petites villes au sein des grandes intercommunalités et régions. Les petites villes feront savoir à chaque candidat quelles sont leurs priorités.
D’ores et déjà, nous réclamons de la stabilité législative pour que les élus aient le temps de travailler et soient libérés des travaux de fusion. Et de la stabilité normative aussi !
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