Vous trouverez ci-dessous une longue interview de Marisol TOURAINE donnée au site Egora.fr dans laquelle la responsable du pôle social, santé, personnes âgées et handicap de l’équipe de campagne de François HOLLANDE détaille le programme du candidat en matière de santé et de soin de proximité.
Egora.fr : Aujourd’hui, l’assurance maladie se trouve dans une situation de déficit récurrent malgré la mise en place en 2005, de franchises sur les remboursements de certains soins et actes médicaux mal acceptées, et une politique de déremboursements de médicaments. Les soins courants ne sont plus remboursés qu’à hauteur de 50 % environ. Que pourrait faire la gauche arrivée au pouvoir pour redresser la situation ?
Marisol Touraine : C’est vrai que le bilan est catastrophique. C’est celui d’une inégalité croissante d’accès aux soins. Le déficit n’a cessé de s’aggraver depuis dix ans, période où nous étions dans une situation où la sécurité sociale était à l’équilibre, et où le déficit de l’assurance maladie était maîtrisé. Or, il n’a cessé de se creuser bien avant la crise alors que le discours de Nicolas Sarkozy consiste à dire que le déficit a augmenté du fait de la crise. Le bilan, c’est 83 milliards de déficit cumulé depuis dix ans, alors que durant le même temps, la prise en charge des soins s’est dégradée. Si “au moins” le déficit avait servi à garantir la bonne couverture, on pourrait se dire que nous avons réussi à sauver le plus important. Même pas. On a le sentiment que derrière l’absence de réformes engagées, il y a le choix inavoué, subreptice, sans débats, de faire évoluer notre système de protection sociale vers une prise en charge accrue par les assurances privées.
François Hollande l’a redit récemment, nous pouvons faire des économies tout en soignant mieux, en allant au plus près des gens. Par exemple, il y a des économies à faire en matière de médicaments : certains déremboursements sont tout à fait inacceptable. Dans le cas d’un remboursement à 15 %, de deux choses l’unes : soit le médicament est utile et on le rembourse, soit il ne l’est pas et on assume de ne plus le rembourser. On a le sentiment que l’on a voulu coute que coute maintenir le remboursement de certains médicaments. Nous disons qu’il faudra faire baisser le coût des médicaments dans notre système, en pesant sur leur prix et en pesant sur leur consommation globale. Nos voisins européens y sont parvenus en mettant en place des mesures beaucoup plus drastiques que ce qui a été fait. Nous disons qu’il faut rétablir un système d’accès aux soins fondé sur la pleine solidarité, et lutter contre les dérives des coûts. La porte d’entrée sera les dépassements d’honoraires car la situation est devenue insupportable, inaccessible pour nombre de nos concitoyens qui ont du mal à se faire soigner par des médecins spécialistes, sans parler des soins dentaires.
Vous voulez aller plus loin dans la politique des génériques ?
Oui. Il faut que davantage de médicaments génériques soient prescrits et en même temps, il faut faire pression sur leur coût. Il faut par ailleurs que les Français consomment moins de médicaments. Il faudra mettre en place des campagnes d’information en y associant les professionnels de santé, les médecins et pharmaciens. Il nous faudra initier une politique vigoureuse en la matière.
Pour lutter contre les difficultés d’accès aux soins, François Hollande préconise la mise en place d’un tiers payant généralisé. Comment ?
Il s’agit d’une entreprise de longue haleine, qui prendra du temps. Il a annoncé la mise en place d’expérimentations permettant d’aller, dans un deuxième temps, vers une généralisation du tiers payant chez les médecins de premier recours. Cette expérimentation pourrait se faire par exemple dans les maisons pluridisciplinaires de santé. Un certain nombre de Français ont des difficultés pour faire l’avance de frais ce qui aboutit à un double effet : soit les gens ne se soignent pas, soit ils vont aux urgences où il n’y a pas d’avance des frais à faire. Et cela coûte très cher à l’assurance maladie.
Comment comptez-vous vous atteler au problème de la mauvaise répartition de l’offre de soins de proximité sur le territoire ?
Les difficultés d’accès aux soins dans certains secteurs ruraux ou sensibles sont devenues préoccupantes. Nous disons clairement qu’il ne faut pas de coercition. En même temps, il faut de la régulation et nous encadrerons les installations en secteur 2 dans les secteurs sur denses.
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