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Extraits des débats au Sénat sur la réforme territoriale le 28 octobre.
M. le président. L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution.
La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, mesdames, messieurs les ministres, notre pays, face à la mondialisation, doit se réformer, pour relever les défis de la compétitivité et de la solidarité, renforcer son économie et moderniser sa puissance publique.
Réformer notre pays, c'est bien la mission que m'a confiée le Président de la République. Mais on ne réforme jamais seul. Réformer implique de dialoguer, d'expliquer, pour que les objectifs soient partagés par tous, ou en tout cas par le plus grand nombre.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il était important pour moi, alors que reprennent aujourd'hui vos travaux sur la réforme territoriale, de m'exprimer dans cet hémicycle. Je vous remercie donc, monsieur le président Gérard Larcher, de votre invitation. Elle me permet de vous exposer le sens de la réforme et sa cohérence.
Souvenons-nous qu'il y a plus de trente ans le Président François Mitterrand affirmait : « La France a eu besoin d'un pouvoir fort et centralisé pour se faire ; elle a aujourd'hui besoin d'un pouvoir décentralisé pour ne pas se défaire. » Ces mots n'ont rien perdu de leur force ni de leur pertinence.
La décentralisation, ce n'est qu'une démarche administrative, pas uniquement un dispositif institutionnel C'est un souffle, un élan, pour l'unité de la République, sa cohésion et l'efficacité de son action.
Pour être plus forte, la République a besoin de renforcer ses territoires.
Dès mon premier discours de politique générale et ici, devant vous, j'ai fait de la réforme territoriale une priorité. Une priorité pour notre pays, pour répondre à ses attentes, aux défis qui se présentent à lui. Le 3 juin dernier, dans une tribune publiée par la presse quotidienne régionale, le Président de la République en a fixé les ambitions.
La France d'aujourd'hui, c'est un pays qui, en trente ans, a gagné dix millions d'habitants. Ce dynamisme démographique est une force que nous devons prendre en compte dans l'organisation, dans l'aménagement de notre territoire. Les trois quarts de la population se concentrent sur 20 % de l'espace : le fait métropolitain n'est pas un fantasme de géographe, c'est la réalité quotidienne de dizaines de millions de Français.
La France d'aujourd'hui, c'est un pays dont les frontières anciennes entre villes et campagnes s'estompent chaque jour davantage. Ainsi, 95 % de nos concitoyens vivent dans des territoires que l'on dit « sous influence urbaine ». Mais ces aires urbaines se diversifient, se complexifient.
La France d'aujourd'hui, ce sont également de nouvelles inégalités territoriales et aussi des fractures, parfois anciennes, qui se sont aggravées.
Je parcours, comme vous, notre pays. J'en connais la beauté et la diversité. J'en perçois aussi les angoisses, les détresses. J'ai parlé à ces habitants des zones aux marges des grandes villes qui s'inquiètent devant la disparition des services publics : la poste, les classes des écoles qui ferment, la brigade de gendarmerie menacée. J'ai aussi échangé, comme vous, avec ces jeunes qui doivent quitter leur village, la petite ville où ils sont nés, où ils ont leurs attaches, parce qu'ils se disent, ou parce qu'on leur dit, que leur avenir n'est plus là. J'ai rencontré, comme vous, ces ouvriers, ces employés qui voient leur usine fermer, parce que l'outil de production est restructuré, délocalisé. J'ai enfin dialogué avec ces agriculteurs, qui, malgré leurs efforts quotidiens, doutent de la pérennité de leur exploitation.
Tous ces témoignages, parmi bien d'autres, viennent souligner ce risque croissant d'une dualité du territoire national.
Dualité, avec, d'un côté, les grandes villes, les métropoles, insérées dans la mondialisation, qui connaissent un vrai dynamisme économique. Il ne faut pas le nier, et même plutôt s'en féliciter, pour en saisir toutes les opportunités, qui doivent profiter à tous. Le législateur en a d'ailleurs tiré les conséquences en 2013, en consacrant le rôle des métropoles, en affirmant aussi la solidarité qui doit exister entre elles et leurs périphéries.
La dualité, c'est, à l'opposé des métropoles, des territoires qui se sentent à l'écart et subissent de plein fouet les effets de la mondialisation, les conséquences de la crise économique et sociale. Ces territoires sont fragilisés. Ils pensent être oubliés, abandonnés par la puissance publique. Ils ont le sentiment que le lien qui les unit à la République s'effrite jour après jour.
Ce qui est remis en cause, c'est la promesse républicaine : offrir les mêmes opportunités que l'on vive au cœur d'une métropole, en banlieue, dans une commune périurbaine, en montagne ou dans les outre-mer.
Rédigé à 15:30 dans Actualité, Collectivités territoriales & État, Vie parlementaire | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Dans le cadre des visites cantonales que j’effectue à un rythme régulier depuis le début de mon mandat, j’étais vendredi 24 octobre sur le canton de Saint-Agrève. Accueilli tour à tour par le maire de Saint-André-en-Vivarais, de Mars, de Devesset, de Labatie-d’Andaure et de Saint-Agrève à leur mairie respective, et rejoint l’après-midi par ma suppléante, Michèle Victory.
L’occasion d’échanger sur la réforme territoriale et de l’intercommunalité, le développement économique du territoire, les dégâts de voirie engendrés par les intempéries qui ont touché l’Ardèche à plusieurs reprises, les projets des communes parmi lesquels plusieurs projets d’aménagement de logements communaux locatifs et, bien sûr, le devenir de l’hôpital de Moze à Saint-Agrève, à l’occasion d’un rendez-vous avec l’association de défense et de développement.
Une journée riche qui s’est achevée par une réunion publique salle Fernand-Roux à Saint-Agrève. J’ai pu rendre compte du travail parlementaire et des dossiers que je suis plus particulièrement dans ce cadre, la réforme territoriale en tête.
Nous avons ensuite pu discuter des sujets de préoccupation des participants tels que le fonctionnement des services déconcentrés de l’État (comme l’Agence Régionale de Santé) ou la réforme des rythmes scolaires et son financement. Un sujet d’interrogation auquel la réponse a depuis été apportée par le Premier ministre.
Le verre de l’amitié, autour de charcuteries locales, a permis d’achever les conversations et de clôturer cette belle journée de façon moins formelle.
Reste désormais à creuser certains dossiers pour apporter rapidement des réponses plus précises aux nombreuses questions posées.
L’Agence Régionale de Santé doit bientôt examiner la demande de transfert des cliniques Saint-Charles à Roussillon et des Cévennes à Annonay vers un établissement à construire à Salaise-sur-Sanne.
Bien sûr, en tant que député de la deuxième circonscription de l’Ardèche, je souhaite que des activités perdurent dans les bâtiments de l’actuelle Clinique des Cévennes. Pour l’emploi, mais aussi parce que le fonctionnement en pôle d’activités de soins est le plus pertinent.
D'autre part, l’établissement à construire doit se conformer strictement aux prescriptions du Schéma régional d’organisation des soins. Il ne s’agit pas là d’une coquetterie ou d’une querelle de clocher, il en va du devenir des hôpitaux publics sur le territoire, dont deux sont situés dans un rayon de 20 kilomètres de ce futur établissement (à Saint-Vallier et Annonay) et un dans un rayon de 30 kilomètres (à Vienne).
Je suis président du conseil de surveillance du Centre hospitalier Ardèche Nord, établissement qui assure une mission de service public de la santé, prenant en charge tous les patients, toutes les pathologies, y compris dans des spécialités non rentables. La pérennité de celui-ci et de la mission de service public qu’il accomplit résulte d’équilibres financiers fragiles.
Aussi je veille à ce qu’ils ne soient pas compromis par un développement non conforme de ce projet privé. Il appartient à son promoteur de donner aujourd’hui des gages de sa bonne foi, que les méthodes employées en coulisses viennent malheureusement mettre en doute.
Rédigé à 18:44 dans Habitants, Ménages, Familles, Nord Ardèche, Services publics & Aménagement du territoire | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
L’Association des Petites Villes de France (APVF), que préside Olivier Dussopt, Député de l’Ardèche et Maire d’Annonay, se félicite de l’annonce par le Premier ministre du maintien du fonds d’amorçage pour le financement de la réforme des rythmes scolaires pour la rentrée 2015-2016.
L’APVF est la première association d’élus à avoir interpellé le Gouvernement sur les risques de non-reconduction du fonds d’amorçage. Nous sommes heureux que le Premier ministre ait entendu l’inquiétude des élus de petites villes.
À l’heure où les communes préparent leur budget pour 2015, la reconduction du fonds, à la condition qu’un projet éducatif territorial soit élaboré, garantira le maintien des nouvelles activités périscolaires pour la rentrée 2015-2016.
L’APVF rappelle cependant que le projet éducatif territorial est un document complexe dans la mesure où il nécessite l’implication de très nombreux partenaires. C’est pourquoi, notre association ne doute pas que Najat Vallaud-Belkacem, Ministre de l’Éducation nationale, veillera à ce que les directions départementales de l’Éducation Nationale accompagnent et soutiennent les collectivités dans son élaboration. C’est une condition essentielle à la réussite de cette réforme et au bon usage de ce fonds.
Rédigé à 18:02 dans APVF, Collectivités territoriales & État, Education, Formation | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Après sept semaines de classe et à l’occasion des vacances de Toussaint, il est possible de dresser un premier bilan de l’application de la réforme des rythmes scolaires à Annonay.
Près de 1.200 enfants profitent de nouvelles activités entièrement gratuites après la classe.
Dans les écoles maternelles, de petites activités légères de fin de journée sont proposées (contes, motricité, activités manuelles, chant...), animées par des agents de la Ville et des animateurs.
Il s’agit de 45 minutes de transition entre l’école et le retour à la maison, une formule adaptée aux besoins des tout-petits en fin de journée.
Dans les écoles élémentaires, chaque enfant bénéficie de deux activités hebdomadaires pendant 1h30. Les premiers retours des enfants et des animateurs sont très positifs.
Les créneaux d’1h30 permettent d’approfondir les pratiques. Le premier cycle d’activités se poursuit jusqu’à Noël. En janvier, les enfants changeront d’activités.
Une majorité de familles avaient déjà inscrit leurs enfants avant la rentrée. En y ajoutant les inscrits depuis le 2 septembre, on atteint un taux d’inscription aux activités de 76% pour les maternelles (jusqu’à 91% à l’école Jean-Moulin) et de 85% pour les élémentaires (91% à Vissenty et aux Cordeliers).
« Ces chiffres montrent bien l’intérêt des enfants et des parents pour ces activités dont la participation reste facultative », se félicite Michel Sévenier, adjoint à l’éducation, à la jeunesse et à la citoyenneté.
Toutes les activités sont opérationnelles, et ce depuis le jour de la rentrée, grâce à un important travail de préparation mené en amont par la Ville et grâce à la mobilisation d’une soixantaine d’intervenants : associations locales, agents de la Ville, professionnels...
Rédigé à 09:00 dans Annonay, Education, Formation, Habitants, Ménages, Familles | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Examen en commission des lois de la proposition... par olivier-dussopt
Cette proposition de loi s’inscrit dans le projet ambitieux de consolider, d’améliorer et de rendre plus attractif le dispositif de commune nouvelle dans un contexte de nécessaire optimisation de notre organisation territoriale.
Il apparaît en effet essentiel de donner une impulsion, dès le début du prochain mandat, à la création de communes plus fortes et d’aider, dans un contexte budgétaire contraint, les collectivités qui le souhaitent à se regrouper pour renforcer leurs moyens, mutualiser leurs compétences et leurs ressources dans une démarche d’optimisation de leur action de proximité et de maîtrise des dépenses.
Les expériences de communes nouvelles menées depuis la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, précurseurs, ont prouvé la pertinence de cette formule mais certaines dispositions relatives à leur statut mériteraient d’être améliorées afin de laisser davantage de souplesse pour faciliter leur fonctionnement et de mieux prendre en compte leurs spécificités.
Ce dispositif particulièrement intéressant peut correspondre à plusieurs situations : le regroupement de communes de petite taille (plus de 31 000 communes de moins de 2 000 habitants), la constitution de centralité (autour de bourgs-centres ou de petites villes), l’aboutissement de l’intégration intercommunale, ...
C’est pourquoi il est proposé de modifier et d’assouplir le régime des communes nouvelles, dans la perspective de le rendre plus intéressant dès le début du prochain mandat, en s’appuyant sur une démarche volontaire et unanime des conseils municipaux. Il s’agit également de clarifier les relations entre les communes nouvelles et l’intercommunalité afin d’aller jusqu’au bout des logiques de regroupement et de tracer les axes d’une réforme des structures.
Cette proposition de loi s’inscrit dans le projet ambitieux de consolider, d’améliorer et de rendre plus attractif le dispositif de commune nouvelle dans un contexte de nécessaire optimisation de notre organisation territoriale.
Il apparaît en effet essentiel de donner une impulsion, dès le début du prochain mandat, à la création de communes plus fortes et d’aider, dans un contexte budgétaire contraint, les collectivités qui le souhaitent à se regrouper pour renforcer leurs moyens, mutualiser leurs compétences et leurs ressources dans une démarche d’optimisation de leur action de proximité et de maîtrise des dépenses.
Les expériences de communes nouvelles menées depuis la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, précurseurs, ont prouvé la pertinence de cette formule mais certaines dispositions relatives à leur statut mériteraient d’être améliorées afin de laisser davantage de souplesse pour faciliter leur fonctionnement et de mieux prendre en compte leurs spécificités.
Ce dispositif particulièrement intéressant peut correspondre à plusieurs situations : le regroupement de communes de petite taille (plus de 31 000 communes de moins de 2 000 habitants), la constitution de centralité (autour de bourgs-centres ou de petites villes), l’aboutissement de l’intégration intercommunale, ...
C’est pourquoi il est proposé de modifier et d’assouplir le régime des communes nouvelles, dans la perspective de le rendre plus intéressant dès le début du prochain mandat, en s’appuyant sur une démarche volontaire et unanime des conseils municipaux. Il s’agit également de clarifier les relations entre les communes nouvelles et l’intercommunalité afin d’aller jusqu’au bout des logiques de regroupement et de tracer les axes d’une réforme des structures.
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INTERVIEW - Martine Aubry s'exprime dans le JDD, une première prise de parole depuis deux ans et demi.
Pourquoi prendre la parole maintenant, après deux ans et demi de silence ?
Je ne me résous pas à voir notre pays s'enfoncer dans la morosité, le doute, le repli sur soi. Je ne baisse pas les bras devant la montée du Front national. Je ne me résigne pas davantage à la victoire en 2017 de la droite, dont on a vu, avec le retour de M. Sarkozy, qu'elle n'a ni appris de ses échecs ni compris les enjeux de notre temps. La gauche n'a pas le droit d'échouer. Il n'est pas trop tard pour réussir, à condition d'emprunter le bon chemin dans les deux ans qui viennent. À gauche, nous aimons le débat, mais lorsque nous sommes au pouvoir, on l'oublie. Le débat n'est pas synonyme de fragilité, mais de vitalité. Le temps qu'on y consacre sera du temps gagné sur l'avenir. Les états généraux lancés par le Parti socialiste nous en offrent une occasion salutaire.
Ce n'était pas une erreur de ne pas entrer au gouvernement ?
Ce qui m'intéresse aujourd'hui, ce n'est pas de refaire le film des deux années écoulées, mais de contribuer à écrire celui des deux ans qui viennent.
Quel bilan tirez-vous de cette moitié de quinquennat ?
Le temps n'est pas au bilan du quinquennat, mais à l'analyse lucide de la situation pour prendre les bonnes décisions. Il y a eu de bonnes choses de faites : le retour de la France sur la scène internationale, les moyens complémentaires donnés à la police, à la justice, à l'éducation, la retraite à 60 ans pour les longues carrières… Mais nous avions prévu qu'à mi-mandat la croissance serait revenue, le chômage en repli et les déficits réduits en deçà de 3%. Ce n'est pas le cas. Il nous faut trouver au plus vite le bon réglage des politiques économiques qui permettra de sortir la France de la crise. Et puis il nous faut refaire de la politique. Aujourd'hui, une raison profonde du malaise est que les Français ne comprennent pas quelle société nous voulons construire, le sens donné à l'action et les valeurs qui la fondent. Même lorsque nos réformes vont dans le bon sens, tels les rythmes scolaires et la priorité donnée à l'école, on n'a pas fixé le cap et engagé les collectivités locales à lutter contre l'échec scolaire ou à promouvoir l'éducation artistique et citoyenne. On ne mobilise pas un pays sur la seule gestion financière, on doit donner la destination du voyage.
Vous ne croyez pas que la politique menée puisse réussir. Pourquoi ?
Regardons la vérité en face. La politique menée depuis deux ans, en France comme presque partout ailleurs en Europe, s'est faite au détriment de la croissance. Les efforts fiscaux et les économies réalisées sur les budgets publics ont engendré des pertes de recettes liées à la moindre croissance qu'ils ont provoquée. Les déficits ne se sont pas résorbés et le chômage augmente. Entendons-nous bien, la question n'est pas de renoncer à réduire les déficits. Je sais de quoi je parle : pour moi, bien utiliser chaque euro qui nous est confié par les Français est une obligation. J'ai rétabli les comptes de la Sécurité sociale, ma ville est bien gérée… Il n'y a pas d'un côté les sérieux et de l'autre les laxistes. Mais je demande une inflexion de la politique entre la réduction des déficits et la croissance. Je demande qu'on réoriente la politique économique.
Est-ce une erreur de mener une politique de l'offre ?
Dépassons cette opposition stérile entre la politique de l'offre et celle de la demande. Il n'y a pas d'un côté les pro-entreprises et de l'autre les pro-ménages. Que nos entreprises qui se trouvent exposées à la concurrence internationale soient aidées pour être plus compétitives, c'est nécessaire, à condition bien sûr de comprendre que la compétitivité – je l'ai appris dans l'entreprise – se joue d'abord sur la recherche et l'innovation, la formation des salariés, l'organisation du travail, l'investissement dans les nouvelles technologies. Mais face aux entreprises, il faut une demande, celle des clients et des collectivités locales. En France, 50% des entreprises disent aujourd'hui faire face d'abord à des problèmes de demande.
Vous critiquez la politique menée, mais quelle autre politique prônez-vous ?
Je propose de mieux cibler les aides aux entreprises sur celles qui sont exposées à la concurrence internationale et sur celles qui investissent et embauchent. Le Medef n'a pas négocié les contreparties promises ; dès lors, plus de la moitié de ces moyens ne vont pas aux entreprises qui en ont besoin, se perdent dans les dividendes et les hautes rémunérations. Réservons donc les baisses d'impôt sur les sociétés aux entreprises qui réinvestissent ; conditionnons toute nouvelle baisse de cotisation à un accord d'entreprise sur la compétitivité et la formation ; fusionnons le CICE [crédit d'impôt compétitivité emploi] avec le crédit d'impôt recherche, finançons mieux les pôles de compétitivité et les investissements d'avenir. Vingt milliards d'euros peuvent et doivent être ainsi libérés sur les 41 milliards d'euros.
Que faites-vous de ces 20 milliards ?
Je propose un plan de soutien à la croissance, qui touche les ménages et les collectivités locales. Il faut agir dans trois directions. L'investissement local tout d'abord. Aucun pays, États-Unis en tête, n'est sorti de la crise sans en passer par là. Le secteur du BTP est en danger. Signons un pacte d'investissement entre l'État et les collectivités locales. Il faut aussi créer davantage d'emplois aidés, comme les emplois d'avenir, pour les jeunes et les chômeurs de longue durée. C'est vrai que c'est un palliatif, mais en attendant d'avoir rétabli la croissance, il est vital. Enfin, il faut soutenir le pouvoir d'achat en agissant sur les loyers avec la loi Duflot, les aides au logement, la politique familiale, des tarifs pour l'eau et l'énergie plus faibles pour les besoins essentiels.
Au fond, vous reprenez la logique des frondeurs, à qui le pouvoir a déjà répondu : « On ne changera pas de politique ». Vous croyez vraiment que vous obtiendrez une autre réponse ?
Je partage leurs propositions dans ce domaine et je regrette que le Parlement n'ait pas pu en discuter. J'espère que la prise de conscience sera là, que le débat aura lieu. En tout cas, plus on sera nombreux à le dire à gauche – élus nationaux ou locaux, mais aussi dans la société civile –, plus on aura une chance d'être entendus. Dans le passé, faute d'avoir débattu, nous avons souvent payé le prix. Il est temps de retrouver le bon chemin, débattons-en. Et puis, ne peut-on arrêter d'appeler « frondeurs », des députés qui connaissent l'économie, souhaitent le succès du gouvernement et portent une vision de la Ve République où le Parlement est pleinement respecté dans ses prérogatives ?
« Notre idéal n'est ni le libéralisme économique ni le social-libéralisme », écrivez-vous. Quel est-il ?
Une nouvelle social-démocratie. De 1945 aux années 1970, la social-démocratie s'était fixé l'objectif de construire un État providence qui gère collectivement les risques – santé, chômage, retraite, famille – par un régime de protection sociale. Ce compromis devait assurer l'égalité des chances grâce aux services publics. Il serait assez curieux, avec la crise, de s'amouracher à contretemps d'illusions des années 1980-1990, qui démoralisent notre pays. Il est temps d'ouvrir les yeux sur une réalité nouvelle : ce modèle n'existe plus. Il a été balayé par la crise. Tony Blair et Gerhard Schröder ont essayé. La mise en concurrence des salariés et des modèles sociaux de par le monde, l'impossible ambition sociale, l'abdication sur le front du plein-emploi font sans doute un choix de société, mais ce n'est pas le mien. Et puis, regardez la situation économique de l'Allemagne aujourd'hui ! Elle n'est pas brillante.
Alors, quel est votre projet ?
Une nouvelle social-démocratie, qui reconnaît le marché mais veut un État stratège pour l'orienter et le réguler. Le marché a tout envahi. On spécule sur tout, y compris les aliments. Tout se marchande, jusqu'à nos corps. C'est le règne du chacun pour soi. Il faut remettre des règles qui défendent la coopération avant la compétition, le bien-être avant le « tout-avoir », la préservation de l'avenir avant le profit immédiat. Bien sûr, l'État doit se moderniser, avec des services publics qui apportent des réponses personnalisées à chacun dans le domaine de l'école, de la santé ou du vieillissement. Je défends un État qui donne toute sa place aux pouvoirs locaux, un État qui régule la mondialisation. Le président de la République défend cette nécessité au niveau européen. Aujourd'hui, les multinationales imposent leur loi aux États. Contre cela, seuls, nous ne pouvons rien, ensemble, en Europe et dans le monde, il faut nous organiser et protéger les biens communs universels. Et puis, cela ne vous étonnera pas, car j'ai consacré une partie de ma vie au monde du travail, cette nouvelle social-démocratie accorde une importance essentielle aux syndicats de salariés et d'employeurs. Mais elle parie aussi sur les citoyens, les mouvements associatifs et coopératifs.
Vous croyez toujours à une société plus douce ?
Bien sûr, je la crois plus que jamais nécessaire. Je défends l'idée d'une société bienveillante, attentive à chacun, mais demande à chacun d'être attentif aux autres et de respecter les règles. C'est ce qu'on appelle « le care, le share et le dare » : le lien social renouvelé, le partage et le goût du commun comme alternative aux simplismes du marché, l'audace et l'imagination pour oser produire du progrès face au déclin. Et dans cette nouvelle société, la culture ne sera jamais un luxe, mais un moyen d'émancipation pour tous.
Manuel Valls et François Hollande sont-ils des sociaux-libéraux ?
Je n'aime pas les étiquettes, à chacun de dire ce qu'il est, ce qu'il veut, et d'agir en conséquence. Et puis, ne personnalisons pas les débats, ils n'en seront que plus riches.
Le FN est en progression constante, il était le premier parti aux élections européennes, peut-il prendre le pouvoir ?
En tout cas, c'est aujourd'hui clairement son objectif. Alors, aux Français qui votent FN ou sont tentés de le faire par dépit ou désespoir, je voudrais dire que les réponses du Front national nous conduiraient à une situation économique et sociale catastrophique, à une division de la société et à un isolement de la France. Il suffit pour s'en convaincre de regarder l'état des villes dans lesquelles il a exercé le pouvoir : elles ne s'en sont pas encore remises, la situation financière s'y est dégradée de manière considérable et les inégalités ont augmenté.
Le gouvernement, très impopulaire, recule sur de nombreux fronts. Peut-on encore réformer ?
Oui. Pour moi, la réforme doit être synonyme de progrès. Il faut en finir avec les vieilles recettes libérales. Ne perdons pas notre temps dans des débats du passé sans cesse remis sur la table par le Medef : le repos dominical, c'était il y a un siècle, l'assurance chômage, soixante ans, les lois Auroux et les seuils sociaux, trente ans, les 35 heures, seize ans. Les remettre en question aujourd'hui, ne nous leurrons pas, ne créera pas d'emplois. Va-t-on passer le XXIe siècle à défaire ce que l'on a fait au XXe ? La responsabilité de notre génération politique n'est pas celle-là. Résolument tournés vers l'avenir, nous devons investir pour régler les trois défis de notre temps : la révolution numérique, le réchauffement climatique et les fractures entre les territoires. Il n'est pas trop tard pour réussir. Tout dépend de nous.
Quel rôle voulez-vous jouer dans cette seconde moitié du quinquennat ?
Je suis candidate… au débat d'idées.
Et seulement ?
Oui.
Alors vous êtes un ovni en politique…
C'est votre appréciation.
Ce quinquennat a été marqué par de fortes hausses d'impôts qui ont entraîné un « ras-le-bol fiscal ». Vous croyez toujours à une grande réforme fiscale ?
Oui, elle est plus que jamais nécessaire pour réconcilier les Français avec l'impôt. Elle est préférable à des mesures au fil de l'eau, aux allers-retours sur les mesures fiscales, aux baisses des prestations familiales ou au gel des retraites qui inquiètent les Français en situation difficile. Nous disons depuis des années qu'il faut faire de la CSG et de l'impôt sur le revenu un seul et même impôt citoyen. Il est temps de le faire. On pourrait ainsi distribuer du pouvoir d'achat aux plus modestes, et le prélèvement à la source permettrait d'éviter de se retrouver dans la difficulté quand votre revenu baisse brutalement.
Emmanuel Macron a annoncé qu'il légiférerait sur le travail du dimanche, est-ce une bonne idée ?
Croire qu'il y a là des gisements d'emplois est un mirage. Le pouvoir d'achat ne va pas s'accroître par miracle parce que l'on consomme un jour de plus. Dans la plupart des cas, les extensions se feraient au détriment du petit commerce – si essentiel à la vitalité de nos quartiers – et donc, in fine, aussi de l'emploi. Et puis surtout, pour moi, il s'agit de choisir dans quelle société nous voulons vivre. La consommation doit-elle être l'alpha et l'oméga de notre vie ? Ne peut-on préserver un jour dans la semaine pour soi, pour sa famille, pour la culture, pour le sport ?
Certains, au pouvoir comme dans l'opposition, veulent déverrouiller les 35 heures. Cette loi que vous avez portée a-t-elle encore du sens ?
Manuel Valls a clairement dit qu'il ne souhaitait pas toucher aux 35 heures. Quant aux dirigeants de la droite, apparemment adeptes du comique de répétition, ils l'ont toujours annoncé, mais ne l'ont jamais fait. Ils savent que les Français y sont attachés et que les entreprises y ont trouvé leur compte. Rappelons par ailleurs que cela a été un formidable moment de négociation et d'accords.
Faut-il réformer l'assurance chômage ?
On ne réforme pas l'assurance chômage au moment où il y a tant de chômeurs. Un accord vient d'être signé entre les partenaires sociaux, avec une application jusqu'en 2016 ; respectons-le. Quand la situation économique était bonne et le chômage en baisse, comme sous Lionel Jospin, le patronat n'a jamais accepté qu'on mette de l'argent de côté pour pouvoir passer des périodes plus difficiles. Remettre aujourd'hui en question ce système, c'est vouloir dire que les chômeurs sont responsables du chômage ou qu'ils sont des fraudeurs. J'ai rendu efficient, comme ministre du Travail en 1992, le contrôle des chômeurs. Je ne supportais pas qu'on puisse penser que les chômeurs l'étaient parce qu'ils le voulaient et qu'ils fraudaient. Et quand c'est le cas, il faut sanctionner. Mais c'est très minoritaire. Mettre de tels débats sur la table alors que le chômage est si important me choque profondément.
Le Journal du Dimanche - Dimanche 19 octobre 2014
Rédigé à 12:00 dans Parti Socialiste, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Par Martine Aubry, et les premiers signataires ayant participé à l’élaboration de la contribution : Christian Assaf, Jacques Auxiette, Philippe Baumel, Dominique Bailly, Francois Bonneau, Kheira Bouziane, Charlotte Brun, Gwenegan Bui, Pierre Cohen, Romain Colas, Laurianne Deniaud, Marie Guite Dufay, Anne-Lise Dufour Tonini, Laurence Dumont, Olivier Dussopt, Jean-Marc Germain, Annie Guillemot, Daniel Goldberg, Chaynesse Khirouni, Matthieu Klein, François Lamy, Audrey Linkenheld, Philippe Martin, Klébert Mesquida, Pierre Alain Muet, Maud Olivier, Gilles Pargneaux, Christian Paul, Dominique Potier, Sylvain Robert, Pierre de Saintignon, Nicolas Soret, René Souchon, Isabelle This-Saint-Jean, Fabrice Verdier, Frédéric Vigouroux, André Vézinhet…
La France traverse une crise qui n’en finit pas. Les Français doutent de leur avenir, de notre force collective en tant que nation, de la politique en tant que solution. Ils ne voient plus nos atouts, ceux qui font encore de notre pays une destination pour la jeunesse du monde ou pour les investisseurs avisés. Nous ne nous résolvons pas à ce que l’espoir déserte les têtes et les cœurs.
La responsabilité écrasante de la droite dans la situation du pays est reconnue par tous. Après le crash de 2008, Nicolas Sarkozy a fui ses responsabilités en n’engageant pas les réformes de fond, tournées vers l’avenir, et en creusant les déficits et la dette à grands coups de cadeaux fiscaux.
Avec toute la gauche, nous avons travaillé à préparer l’alternance de 2012, et comme la majorité des Français, nous y avons vu le signal du changement. Cette espérance en grande partie déçue, comme l’ont exprimée deux lourdes sanctions électorales, il est de notre devoir de la faire renaître. À mi-parcours.
Nous croyons plus que jamais à l’action collective. Quand tout va bien, les choix politiques sont plus faciles. Par temps de récession partout en Europe, et de grandes transformations des modèles de développement dans le monde, la politique exige une vision et une méthode, pour entraîner et réussir. Si rien n’est écrit à l’avance, c’est bien à la volonté commune qu’il revient de faire pencher la balance, entre le redressement ou le déclin, entre la confiance ou la soumission.
Une raison profonde du malaise, même si nous pensons que les Français ont bien compris qu’il fallait réduire les déficits pour préserver l’avenir, est qu’ils ne comprennent pas quelle société nous voulons construire, sur quelles valeurs nous nous appuyons. Bref, nous donnons l’impression de ne plus porter un projet politique. Bien sûr, être de gauche, c’est bien gérer l’argent public, maîtriser dettes et déficits. Mais aujourd’hui, le moyen est devenu le but. Le cap est devenu une succession de courbes et de chiffres, 50 milliards, 41 milliards, 3%… Les Français ne voient plus à quoi servent leurs efforts. Quand on repense la politique familiale, au lieu de présenter une politique qui concilie vie familiale et vie professionnelle et qui réduit les inégalités, on aboutit à une succession de mesures budgétaires qui font perdre le sens. Même lorsque nous agissons utilement, comme en matière d’éducation, nous perdons le fil de notre projet. On ne transforme jamais le réel en renonçant à l’idéal.
La politique n’est pas un voyage sans destination. La politique, c’est dire dans quelle société nous voulons vivre, fixer les buts, les progrès, montrer le chemin pour y parvenir. Les États généraux lancés par le Parti socialiste nous offrent une occasion salutaire. Trop souvent, nous avons mis un voile sur nos débats lorsque nous étions au pouvoir. Nous en avons payé le prix, faute d’avoir su retrouver à temps le bon chemin. Le silence des idées n’est pas le signe d’une démocratie vivante, la pensée unique n’est plus tout à fait la pensée. Le débat n’est pas davantage la division, mais au contraire la condition pour retrouver l’unité à gauche si précieuse pour réussir.
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Le préalable, c’est la sortie de crise : sans résultats dans ce domaine, les pessimismes l’emporteront. Le temps n’est pas au bilan du quinquennat, mais à l’analyse lucide de la situation, pour réussir. La politique actuelle ne produit pas les résultats escomptés. Nous avions prévu qu’à mi-mandat – nous y sommes – la croissance serait revenue, le chômage en repli et les déficits réduits bien en-deçà de 3%. Rien de tout cela n’est advenu.
Évacuons d’emblée les faux débats. Il n’y a pas d’un côté les fourmis, et de l’autre les cigales. Regardons la vérité en face. La politique menée depuis deux ans s’est faite au détriment de la croissance et donc ne peut réussir. Les efforts fiscaux et les économies réalisées sur les budgets publics ont engendré des pertes de recettes liées à la moindre croissance qu’ils ont provoquée. Les déficits ne se sont pas résorbés, sans compter les effets sur l’emploi qui ont été catastrophiques. La bonne voie reste un meilleur dosage, certes subtile à trouver, entre la nécessaire réduction des déficits et la croissance.
Il n’y a pas non plus les archaïques et les modernes. Que nos entreprises, celles qui se trouvent exposées à la concurrence internationale aient besoin d’améliorer leur compétitivité, c’est une évidence, à condition bien sûr de comprendre que la compétitivité se joue d’abord sur la recherche et l’innovation, la formation des salariés, l’investissement dans les nouvelles technologies. Mais face aux entreprises, il faut une demande, celle des clients et des collectivités locales. En France, 50% des entreprises disent aujourd’hui faire face d’abord à des problèmes de demande, 15% à des problèmes liés à l’offre. Là aussi, c’est une question d’équilibre qu’il faut trouver entre le soutien à l’offre et à la demande.
L’idée que la relance pourrait venir de l’Europe, et la rigueur des États, est séduisante, mais peu opérante. Les robinets du crédit de la Banque centrale européenne sont désormais ouverts, mais l’ont été trop tardivement pour espérer que le redémarrage vienne de ce côté-là. Les effets des plans d’investissements resteront modestes tant que l’Europe ne sera pas dotée d’un budget propre suffisamment important. Aussi longtemps que les pays européens se regarderont en chiens de faïence, chacun espérant que la croissance viendra de l’autre, rien ne bougera.
Prenons les devants, agissons chez nous : charité bien ordonnée commence par soi-même. Les marges de manœuvre existent du côté des 41 milliards d’euros d’allégements fiscaux et sociaux en faveur des entreprises. Le Medef n’a pas négocié les contreparties promises, dès lors plus de la moitié de ces moyens mis à la disposition des entreprises ne vont pas à celles qui en ont besoin, se perdent dans les dividendes et les hautes rémunérations. Réservons les baisses d’impôt sur les sociétés aux entreprises qui ré investissent ; conditionnons toute nouvelle baisse de cotisations à un accord d’entreprise sur la compétitivité et la formation ; fusionnons le CICE avec le Crédit d’Impôt Recherche en nous inspirant de ce dernier, qui a fait ses preuves et qui pourrait être étendu aux process de fabrication et modulé pour favoriser les PME et les ETI exportatrices ; finançons mieux les pôles de compétitivité et les investissements d’avenir ; redonnons de l’air à la recherche publique et des emplois pérennes aux chercheurs.
20 milliards d’euros sur ces 41 peuvent et doivent être ainsi libérés et utilisés pour un plan de soutien à la croissance, qui touche les ménages et les collectivités locales. La baisse d’impôt annoncée de cinq milliards fait un pas dans cette direction, mais tout laisse à penser qu’il ne suffira pas. Vingt milliards d’euros, c’est 1% du PIB, c’est 1% à 1,5% de croissance en plus dans les deux ans qui viennent. La frontière n’est pas mince. C’est celle qui sépare la croissance de la stagnation, la baisse du chômage de la hausse. C’est la clé du retour de la confiance. Il n’y a là aucun laxisme puisqu’il s’agit de purs re-déploiements budgétaires, qui n’aggravent pas les déficits. Gageons même que la croissance revenue, ils permettront plus sûrement d’atteindre la trajectoire annoncée de 4,4% de déficits en 2014, 4,3% en 2015.
Signons au plus tôt un solide pacte d’investissement entre l’État et les collectivités locales, antidote à la crise du BTP qui s’étend chaque jour davantage. Relançons vigoureusement les emplois aidés pour les jeunes et les chômeurs de longue durée. L’emploi privé, c’est l’objectif, mais tant qu’il n’est pas là, l’emploi associatif, c’est la transition, une transition vitale pour les chômeurs et une impulsion indispensable économiquement pour rétablir la confiance qui est une forme de facteur de production. Soutenons le pouvoir d’achat en agissant sur les loyers avec la loi ALUR, les aides au logement, la politique familiale, des tarifs pour l’eau et l’énergie plus faibles pour les besoins essentiels…
Mais il nous faut aller plus loin en réalisant la grande réforme fiscale promise en 2012 et toujours repoussée. Nous la croyons préférable à des mesures au fil de l’eau, aux baisses de certaines prestations familiales ou au gel de retraites qui inquiètent les Français en situation difficile. Réduisons la CSG sur les premières tranches de revenus pour redonner du pouvoir d’achat, et engageons sa fusion avec l’impôt sur le revenu pour créer cet impôt citoyen, plus juste parce que plus progressif et prélevé à la source et qui ainsi réconciliera les Français avec l’impôt. Et puis, verdissons systématiquement les taxes à la consommation pour favoriser les achats écologiques et, en accompagnement d’une décentralisation qu’il faut approfondir, réformons la fiscalité locale, pour donner à chaque collectivité les moyens de lever l’impôt en lien avec leurs missions, et en renforçant la péréquation.
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Oui, engageons sans délai ce reprofilage en profondeur de notre politique économique. Et ne perdons pas notre temps dans des débats dépassés !
Ainsi le repos dominical : il s’agit-là de choisir dans quelle société nous voulons vivre. Faut-il vraiment considérer que la consommation est l’alpha et l’omega de notre vie ? Ne peut-on préserver un jour dans la semaine pour soi, pour sa famille, pour la culture, pour le sport ? Chacun sait que le pouvoir d’achat ne va pas s’accroitre par miracle parce que l’on consomme un jour de plus, sauf, peut-être dans certaines zones touristiques où des aménagements peuvent exister. Et ne voit-on pas que les extensions se feront au détriment du petit commerce -si essentiel à la vitalité de nos villes- et donc in fine aussi de l’emploi ?
Que dire aussi des seuils sociaux, pense-t-on vraiment, en 2014, qu’associer les salariés à la vie de leur entreprise est un handicap? Quant aux 35h, cela fait seize ans que la droite veut les supprimer, elle ne l’a jamais fait parce qu’elle sait que les Français y sont attachés, qu’elles ont été à l’origine d’un mouvement sans précédent de négociation de branches et d’entreprises dans lequel elles ont trouvé leur compte. Ce sont des vieilles recettes libérales, des reculs dont l’effet sur l’emploi est au mieux insignifiant, au pire inexistant. Détricoter au XXIème siècle les progrès du XXème est une étrange option pour la modernité.
De 1945 aux années 1970, la social-démocratie s’était fixée, par un double compromis entre l’État et le marché, et le patronat et les syndicats, l’objectif de construire un État-providence qui gère collectivement les risques –santé, chômage, retraite, famille- par un régime de protection sociale, et qui assure l’égalité des chances par des services publics.
Depuis les années 1980-90, certains en Europe, même à gauche, ont cru devoir choisir entre la préservation du modèle social, complice selon ses détracteurs du chômage de masse, et un projet très imparfait, mais capable à court terme, disaient-ils, de quelques résultats optiques. Or, il est temps d’ouvrir les yeux sur une réalité nouvelle : ce projet n’existe plus, il a été balayé par la crise. Le capitalisme financier, très largement dérégulé, est devenu un système instable, qui engendre des crises régulières et dévastatrices, dont les inégalités deviennent d’authentiques freins au développement partout sur la planète.
Il serait assez curieux, avec la crise sous les yeux, de s’amouracher à contretemps d’illusions qui démoralisent notre pays. Les tentatives de Tony Blair et de Gérard Schröder sont derrière nous. La mise en concurrence des salariés et des modèles sociaux de par le monde, le postulat de l’impossibilité d’une ambition sociale, l’abdication sur le front du plein emploi font pour certain un choix de société. Ce n’est pas notre projet. Notre idéal n’est ni le libéralisme économique, ni le social libéralisme.
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Ce refus signifie le contraire de l’immobilisme. Nos réponses doivent être immergées dans la France d’aujourd’hui. Nos valeurs doivent être formulées, revendiquées, reliées les unes aux autres, pour donner une pensée et un souffle.
Notre projet, c’est une nouvelle social-démocratie.
La nouvelle social-démocratie reconnaît le marché, mais elle veut un État stratège pour l’orienter et le réguler. Elle a appris que la société ne peut pas fonctionner sans règles, des règles d’ordre public qui s’imposent à tous. Elle défend la coopération avant la compétition. Elle veut le bien-être avant le tout avoir. Elle œuvre pour la préservation de l’avenir avant le profit immédiat. La puissance publique s’y déploie au plus près des citoyens, par une reconnaissance du rôle essentiel des pouvoirs locaux, des départements et des régions, mais aussi supranationalement, en Europe d’abord, et avec d’autres continents ensuite, pour réguler la mondialisation et protéger les biens communs universels, l’accès à l’eau, les océans, les forêts, la biodiversité, le climat, le patrimoine, les droits humains fondamentaux, la paix.
La nouvelle social-démocratie reconnaît le rôle essentiel des syndicats de salariés et d’employeurs, mais l’inscrit dans une hiérarchie des normes qui garantit les droits fondamentaux et l’équilibre des rapports sociaux. Elle en appelle aussi aux citoyens, à leurs mouvements associatifs et coopératifs, et à tous ceux qui expérimentent et défrichent de nouvelles façons d’agir, de produire et de vivre ensemble.
La nouvelle social-démocratie est tout sauf une répétition : elle est productrice d’innovations publiques majeures. Elle donne à la réforme la force d’une transformation positive. Les vraies « réformes structurelles » à engager concernent la fiscalité progressive, le secteur bancaire, ou encore la modernisation de l’État. Elles doivent rechercher l’efficacité et la justice, ne pas renoncer à l’extension des droits, améliorer les protections collectives, le fonctionnement des services publics, refuser leur privatisation qui deviendrait le passeport pour le déclassement.
La nouvelle social-démocratie a l’égalité comme boussole et l’individu comme référence. Elle considère les services publics, personnalisés, comme fondements de l’égalité réelle, de l’école par une refonte des rythmes, des programmes, des méthodes pour porter chaque enfant au plus haut, jusqu’au troisième âge qui doit être celui d’un nouvel âge de la vie grâce à l’adaptation de la société au vieillissement, en passant pour la vie active par un compte personnel temps-formation garantissant la progression professionnelle, sécurisée, tout au long de la vie, et la maîtrise de l’articulation avec la vie familiale et personnelle.
La nouvelle social-démocratie veut une société bienveillante, attentive à chacun, mais demande à chacun d’être attentif aux autres, de respecter les règles et les autres. Elle est fondée sur « le care, le share et le dare »: le lien social renouvelé, le partage et le goût du commun comme alternative aux simplismes du marché, l’audace et l’imagination pour oser produire du progrès face au déclin. La culture n’y est pas considérée comme un luxe, mais comme le moyen de l’émancipation, et pour chaque génération la possibilité de laisser sa mémoire et sa trace.
Dans ce nouveau moment social-démocrate, notre responsabilité est d’investir dans l’avenir face aux trois défis de notre temps : la révolution numérique, le réchauffement climatique, et les fractures entre les territoires. Ils sont l’odyssée, l’aventure et le risque dont nous devons nous saisir. Personne ne le fera à notre place. La loi sur la transition énergétique actuellement en discussion au Parlement est une première étape en ce sens. La mutation numérique et les chocs écologiques accouchent une troisième révolution industrielle, celle des réseaux sociaux, des objets connectés, des énergies décentralisées et renouvelables. Elle n’est pas spontanément bénéfique !
Il y a beaucoup d’investissements à faire pour en tirer parti dans l’emploi, l’éducation, la santé, et pour reconquérir tous ces territoires urbains ou ruraux, qui se sentent aujourd’hui victimes de la mondialisation et oubliés de la République. Il y a enfin nos libertés à préserver contre « la société de surveillance », mais plus encore des libertés nouvelles à conquérir.
Enfin, chaque révolution industrielle appelle un nouvel âge démocratique fondé sur de nouvelles institutions. La prochaine République doit rééquilibrer les pouvoirs de l’exécutif et du législatif, conforter encore l’indépendance de la justice, inventer de nouvelles voies d’implication des citoyens, et garantir la pérennité des services publics et de régimes sociaux, et la protection de l’environnement.
« Des formes nouvelles, sinon rien », écrivait Tchekhov. Trouvons au plus vite l’optimisme de conduire notre pays, avec les Français, sur le chemin d’une nouvelle renaissance. Il n’est pas trop tard, mais il est grand temps !
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Le Bureau de l’Association des Petites Villes de France (APVF), que préside Olivier Dussopt, a décidé d’alerter le Gouvernement et les parlementaires sur plusieurs dispositions du Projet de loi de finances 2015 qui concernent les collectivités locales. Le Bureau de l’APVF continue de dénoncer l’importance de la baisse des dotations et rappelle que malgré la nécessité de redresser les comptes publics, la dette locale ne représente que 9,5% de la dette totale. Or, sur les 50Mds€ d’économies, les collectivités territoriales supporteront au total une baisse de 11Mds€ en valeur, soit 22% de l’effort.
En matière de fiscalité, l’APVF demande une révision forfaitaire des bases suffisante pour que la progression des recettes fiscales annoncée par le Gouvernement puisse se réaliser.
Le Bureau de l’APVF réitère son attachement à la montée en puissance de la péréquation. Cette progression doit s’accompagner d’une révision des critères de péréquation, afin d’éviter les effets pervers constatés au sein des intercommunalités. La richesse des communes et de leurs groupements doit être mieux appréciée et la prise en compte de l’effort fiscal doit progresser.
Enfin, en rappelant le rôle majeur des collectivités locales pour soutenir la croissance, le Bureau de l’APVF rappelle la nécessité d’un soutien plus fort à l’investissement local par la création d’un fonds d’investissement public. À ce sujet, l’APVF a pris connaissance avec satisfaction des amendements sur le Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) qui ont été adoptés en Commission des finances à l’Assemblée nationale, elle forme le vœu que ces amendements soient votés en séance publique.
Mais ces mesures ne compenseront cependant pas la baisse des dotations qui aura de surcroît des conséquences en matière de fonctionnement des services publics.
Le Bureau de l’APVF rappelle que les collectivités locales peuvent constituer de véritables partenaires du redressement du pays à la condition que le Gouvernement prenne en compte leurs difficultés et leur capacité de soutien à l’emploi local par l’investissement.
Rédigé à 10:30 dans APVF, Collectivités territoriales & État, Services publics & Aménagement du territoire | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
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