La suppression de la taxe professionnelle en 2009 a été brutale, non concertée, et aujourd’hui encore les pouvoirs publics ont des difficultés à en mesure les conséquences sur les entreprises comme pour les collectivités locales et l’Etat. Lorsque le gouvernement Fillon a pris cette décision, nous étions plusieurs à dire - à l'assemblée comme dans les associations d'élus - qu'elle était irréfléchie, dangereuse et lourde de conséquences. Aujourd'hui l'explosion de la CFE illustre le caractère irréfléchi et improvisé de cette réforme qui fait l'effet d'une bombe à retardement.
Les premiers rapports parlementaires et gouvernementaux montrent d'abord que cette mesure est plus couteuse que prévu pour les finances publiques, qu’elle a compliqué la situation des collectivités et que ses dernières adaptations ont crée un climat instable et insécurisé pour les chefs d’entreprises. J'ai en tête les propos l'an dernier du rapporteur général du budget qui soulignait que cette réforme coutait plus de 9 milliards d'euros par an à l'Etat. Il s'agissait, l'an dernier, de Gilles Carrez, député UMP.
Avec d’autres députés de mon groupe politique, nous avions souligné ces risques lors de l’examen de cette mesure décidé par le Gouvernement de François Fillon en 2009.
Contrairement à ce qu'avait laissé croire le gouvernement de l'époque, la taxe professionnelle a dans la plupart des cas été remplacée par d'autres impôts et taxes.
Pour la grande majorité des entreprises, la taxe professionnelle a été remplacée par la Cotisation du la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE) qui est due sous réserve d’atteindre des montants minimum, et par la Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) qui est due par toutes les entreprises. D'autres taxes spéciales avaient été créées sur les infrastructures de transports et autres matériels spécifiques. Un rapport sénatorial publié le 26 juin 2012 montre que 60% des entreprises sont gagnantes (dont une immense majorité avec un chiffre d'affaire entre 250 et 500 000 euros), 20% des entreprises ont vu leur imposition rester stable et 20% sont érodantes soit environ 800 000 entreprises.
Il faut aussi dire qu'avec cette réforme, les communautés de communes ont subi trois effets. Le premier est que lors recettes fiscales qui portaient de manière égale sur les entreprises et les ménages portent désormais pour les trois-quarts sur les ménages. Le deuxième est qu'elles ont perdu leur droit de fixer l'impôt puisqu'elle taux de CVAE est fixé par l'Etat et non plus par elles. Enfin, elles ont vu disparaître le dynamisme de leurs émettes puisque une large partie de leur fiscalité a été remplacée par des dotations gelées. Les communautés fixent simplement le taux de CFE.
Aujourd'hui ce qui fait débat tient au calcul de la CFE et en particulier de ses bases.
Pourquoi en sommes-nous arrivés là?
Il faut rappeler que la suppression de la taxe professionnelle s’était traduite par une baisse extrêmement importante – pouvant atteindre 90% - des taxes payées par certaines entreprises en particulier dans le secteur du service, du commerce de détail et des professions libérales. Cela a paru injuste au gouvernement précédent qui a cherché à corriger cela et, en plus, à limiter le coût pour l'Etat.
Pour rétablir un niveau minimal de cotisation, il a été demandé aux intercommunalités de déterminer une « base minimale » et les élus intercommunaux devaient délibérer avant le 1er octobre 2011. A défaut, c’est l’ancienne base d’imposition de la taxe professionnelle qui aurait été retenue. La quasi-totalité des élus intercommunaux ont pris cette délibération. Il faut rappeler, à leur décharge, que cela a été fait alors que les services du ministère des finances n’étaient pas en mesure de fournir de réelles simulations. Je l’avais indiqué au cabinet de François Baroin, alors ministre des finances publiques. Beaucoup ont donc délibéré sans mesurer exactement les effets de telle ou telle décision.
Les élus intercommunaux avaient donc à décider du niveau de « base minimale » en respectant une double « fourchette » et ils devaient impérativement le faire avant le 1er octobre 2011 :
- Pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaire ou des recettes d’un montant de moins de 100 000 euros hors taxes, la « base minimale » devait être fixée à un montant compris entre 203 et 2030 euros.
- Pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaire ou des recettes d’un montant de plus de 100 000 euros hors taxes, la « base minimale » devait être fixée à un montant compris entre 203 et 6000 euros.
Les variations de fiscalité engendrées dépendent donc beaucoup de la « base minimale » définie par les conseils communautaires. Cela ajoute un sentiment d’inégalité entre les entreprises situées sur des territoires voisins.
La Communauté de Communes du Bassin d'Annonay a délibéré le 27 septembre 2011. Elle a fait le choix suivant :
- pour les entreprises réalisant moins de 100 000 euros de chiffre d'affaires, elle a fixé la base minimale à 1166 euros (soit l'équivalent de la base minimale qui existait lorsque la TP existait).
- pour les entreprises réalisant plus de 100 000 euros de chiffre d'affaires, elle a fixé la base minimale à 3500 euros.
C'est un choix très raisonnables au milieu de la fourchette comprise entre 203 et 2030 pour le premières et entre 203 et 6000 pour les suivantes. Beaucoup de communautés de communes ont fait des choix plus élevés. Ainsi, celle du Pays de l’Hermitage l’a fixée à 6000 euros et que celle du Tournonais l’a fixée à 5300 euros.
Le choix des bases de la CCBA a été voté à l'unanimité du conseil communautaires.
Aujourd'hui, alors que les entreprises reçoivent leurs fiches d'imposition. Force est de constater qu'à l'échelle de notre communauté de communes du bassin d'Annonay, cela se traduit par une augmentation pour les entreprises réalisant plus de 100 000 euros de chiffres d'affaire et ayant une valeur locative de moins de 3500 euros (avec une différence pour celles en-dessous de 1166 euros de valeur locative).
Tout le monde mesure les effets sur les commerçants et les artisans concernes. Et encore plus à un moment où le gouvernement de Jean-Marc Ayrault fait un effort important en faveur des entreprises.
Nous payons, les entreprises concernées d'abord, les effets des décisions de 2009 et 2011 prises la majorité UMP précédente et son gouvernement qui, sous couvert d'un faux cadeau aux entreprises, avaient allumé la mèche d'une véritable bombe à retardement.
Nous avons, un an après et alors que ces décisions sont mises en œuvre par les services fiscaux, à trouver une solution qui permette de trouver un bon équilibre. Cela passera nécessairement par une réforme de la fiscalité au niveau national.
Cette réforme devra garantir la stabilité pour les entreprises mais aussi des recettes pour les collectivités locales. C’est d’autant plus important que les collectivités locales représentant plus de 72% de l’investissement public et que leurs investissements permettent aux entreprises de mieux faire face à la crise. Je forme le vœu que la réforme à venir de l’organisation territoriale et de l’action publique soit aussi l’occasion d’une réforme de la fiscalité locale permettant clarté, justice et stabilité.
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